Publié le Mardi 5 juillet 2011 à 12h04.

Rencontres anticapitalistes méditerranéennes : un premier pas encourageant

Dans le cadre des campagnes internationalistes du NPA, se sont déroulées à Marseille, les 7 et 8 mai derniers, les premières Rencontres anti-capitalistes méditerranéennes.

Ces rencontres sont intervenues dans un contexte particulier où les révolutions dans le Maghreb et le Machrek ont remis sur le devant de la scène la capacité des peuples à prendre leur destin en main. Le rapprochement des anticapitalistes et des révolutionnaires se pose donc comme une nécessité, à la fois pour favoriser les processus révolutionnaires en cours mais aussi pour faire face aux dégâts croissants de la crise.

Le premier objectif de ces rencontres qui était de réunir un maximum d’organisations a été atteint puisque pas moins de dix-neuf délégations représentants onze pays (Maroc, Tunisie, Égypte, Liban, Irak, Grèce, Italie, Corse, État espagnol, Chypre du Nord, Palestine) ont répondu à l’invitation du NPA. De plus, sans les problèmes de visas ou autres problèmes essentiellement techniques, les rencontres auraient pu regrouper d’autres délégations venant des Balkans, d’Algérie ou encore de Turquie.

Après un premier temps, le samedi matin, de présentation de chacune des délégations, les travaux ont débuté par un long débat sur l’analyse des processus révolutionnaires en cours au sud de la Méditerranée. L’ensemble des participantEs étaient d’accord sur l’aspect historique de ces révolutions et le fait qu’elles constituent un point d’appui majeur pour l’ensemble des peuples en lutte partout dans le monde. Face à la contre-révolution (de la bourgeoisie et des impérialistes) en marche en Tunisie ou en Égypte mais aussi dans les autres pays de la région, l’accent a été mis sur le fait que les anticapitalistes de tout le pourtour méditerranéen devaient s’organiser et développer une solidarité sans faille avec les révolutions en cours, mais aussi contre leurs propres dirigeants.

La deuxième partie des travaux et des débats s’est faite autour de l’analyse de la crise, de ses conséquences et de la résistance des peuples. Là encore, une analyse commune des désastres de la crise a été partagée, et les différentes expériences de résistances abordées. La présence de camarades grecs et espagnols notamment, était un plus et a permis d’enrichir le débat, en complémentarité des expériences menées au sud de la Méditerranée. La question de la dette a aussi été abordée comme axe possible de campagne internationale commune.

Enfin, l’immigration et l’Europe forteresse, ainsi que les logiques impérialistes ont clôturé les séances de débats par de riches échanges. En effet, que ce soit par la présence militaire en Palestine, en Afghanistan ou en Libye, ou économique en Tunisie ou au Maroc par exemple, il ne fait aucun doute que les pays européens, avec la France en particulier, tentent par tous les moyens de s’imposer dans les régions du sud de la Méditerranée. Là encore, la résistance internationale des peuples et des anticapitalistes est décisive.

La déclaration commune sortie de ces rencontres et issue des nombreux débats menés lors de ce week-end est donc un premier acte de la volonté de l’ensemble des organisations présentes à s’inscrire dans un travail à long terme.

Ces rencontres ont donc permis aux différentes organisations de discuter, et pour certaines de travailler ensemble pour la première fois, comme le confirme la décision, lors d’une réunion improvisée, des organisations du Maghreb et du Machrek de se retrouver rapidement pour organiser des rencontres anticapitalistes des pays arabes.

Au-delà du plaisir de se retrouver, de discuter ensemble, que ce soit en commission ou de façon informelle notamment lors des repas, ces rencontres confirment la nécessité d’un travail en commun afin de lutter ensemble contre le système capitaliste et impérialiste. Ce besoin se retrouve notamment dans la proposition qu’un comité de suivi soit chargé de préparer les prochaines rencontres qui auront lieu dans un pays du sud de la Méditerranée.

Bien sûr, ce n’était qu’une première rencontre mais l’élan est donné et, à voir l’envie des délégués de continuer les débats, la réussite de ces rencontres est réelle et celles-ci ne devraient être que les premières d’une longue et fructueuse série. À terme, des actions en commun, simultanément partout en Méditerranée, pourraient être organisées.

Commission internationale du NPA 13

Nous reproduisons donc ci-contre la déclaration finale issue des premières Rencontres anticapitalistes méditerranéennes et la liste des signataires. 

Appel des participants à la première rencontre des organisations anticapitalistes de la Méditerranée. Marseille les 7 et 8 mai 2011

Ces premières Rencontres anticapitalistes méditerranéennes marquent un premier pas dans la connaissance mutuelle de nos organisations et des combats que nous menons dans nos pays respectifs. Elles interviennent dans un contexte international marqué par la crise globale du capitalisme mondialisé et la poussée révolutionnaire des peuples de la région arabe. La crise témoigne du paroxysme des contradictions du système dominant à tous les niveaux. Il s’avère incapable de satisfaire les besoins élémentaires de la majorité des peuples, de préserver les conditions de vie sur la planète et ses ressources.

Partout les classes dominantes mènent une guerre sociale ouverte pour nous faire payer la crise et perpétuer la domination d’une minorité. Que ce soit au nord ou au sud de la Méditerranée, les politiques actuelles imposent une dégradation générale des conditions de vie et de travail, dans un système global d’accroissement de la précarité. Elles alignent vers le bas les acquis sociaux et démocratiques quand ils existent et imposent la concurrence entre les peuples et les travailleurs. La surexploitation des ressources naturelles et la marchandisation des biens communs accélèrent le désastre écologique. Rompre radicalement avec ce système et non pas l’aménager, ouvrir la voie au socialisme comme projet d’émancipation sociale, démocratique, reconstituer l’unité d’intérêt du monde du travail par-delà les frontières, est d’une actualité brûlante.

Les révolutions que nous vivons dans les pays du sud de la Méditerranée et au Moyen-Orient donnent un nouvel espoir et engagent de nouvelles perspectives de luttes. Ces processus ouvrent la possibilité non seulement d’en finir avec les dictatures mais aussi avec les politiques imposées par la mondialisation capitaliste. La soif de dignité, de justice sociale, de satisfaction de l’ensemble des aspirations sociales et démocratiques traversent aujourd’hui l’ensemble des pays de la région. L’accumulation de nouvelles victoires sociales et démocratiques, l’approfondissement de la révolution permettrait d’imposer une défaite politique à l’impérialisme et pèserait dans le changement des rapports de forces internationaux. Elles permettront à terme de sortir le peuple palestinien de cette tragique solitude et de donner une impulsion majeure à la lutte contre l’État colonial et sioniste. La lutte contre l’intervention militaire en Libye et les ingérences impérialistes dans la région pour étouffer les processus révolutionnaires est un élément essentiel pour l’avenir. Il nous faut aussi dans ce cadre combattre l’Otan.

La solidarité avec tous les peuples en lutte est une nécessité incontournable pour toutes nos organisations. Leur combat est le nôtre. L’intervention militaire impérialiste avec son propre agenda ne peut briser cette solidarité.

Au nord même de la Méditerranée, il y a une vague de résistances sociales, de grèves générales, de refus des politiques d’austérité et des ravages de la crise. Nulle part les peuples ne se résignent. Dans ce contexte, la lutte coordonnée contre l’impérialisme, l’offensive des bourgeoisies pour faire payer aux peuples la crise, la colonisation en Irak, Afghanistan et Palestine, devient un enjeu majeur. La lutte contre l’Europe forteresse, la fonction de gendarme octroyée à des États du Sud, les racismes d’État et la montée des courants d’extrême droite en est le prolongement nécessaire.

Nous devons développer les chantiers d’une lutte et de campagnes internationales communesdu Maroc à l’Irak :

- pour le soutien des révolutions, des luttes populaires et des secteurs qui luttent contre la domination impérialiste et les dictatures régnantes. Les États impérialistes essaient de consolider de nouveaux régimes soumis à leurs impératifs économiques et politiques pour combattre et confisquer les processus révolutionnaires en cours en s’appuyant sur des mouvements politiques bourgeois qui sont partie intégrante du système capitaliste.

- Nous dénonçons la répression qui s’abat sur les peuples insurgés en Syrie, Yémen, Bahreïn et tous les peuples de la région.

- Nous soutenons le droit à l’autodétermination des peuples à tous les niveaux (Corse, Sardaigne, Euskadi, Chypre, Kurdistan...), leur auto-organisation et la satisfaction de l’ensemble de leurs aspirations sociales, démocratiques et culturelles. Nous dénonçons la répression féroce que subit le peuple kurde par les différents États ainsi que le silence complice des gouvernements occidentaux. Nous exigeons le démantèlement de toutes les formes de bases et installations militaires à Chypre et le retrait immédiat des forces d’occupation turques et troupes et forces étrangères: britanniques, états-uniennes, grecques, françaises, etc.

- Nous militons pour l’arrêt de toute forme de soutien, diplomatique, économique, financier et des accords sécuritaires et militaires des États du Nord avec les dictatures

- Pour la fin de l’impunité de tous ceux qui ont pillé leurs pays et imposé des États policiers.

- Pour le refus de toute ingérence impérialiste dans la région, le retrait immédiat des forces d’intervention en Libye et des troupes d’occupation en Irak et en Afghanistan.

- Pour le démantèlement des bases militaires impérialistes et du commerce d’armes et la dénucléarisation de toute la région méditerranéenne.

- Pour que les États de Méditerranée et d’Europe rompent leurs liens avec l’Otan dans la perspective d’une coopération multilatérale dans la région sans ingérence militaire.

- Pour l’amplification du mouvement de solidarité internationale avec le peuple palestinien jusqu’à la réalisation de ses aspirations nationales et le démantèlement de l’État colonial d’Israël: levée immédiate du blocus de Gaza et réouverture de la frontière avec l’Égypte, comme l’exigent les révolutionnaires égyptiens. L’abolition des traités et des relations avec l’État d’Israël, la libération sans conditions des prisonniers politiques palestiniens, le droit au retour des réfugiés. Nous soutenons la campagne internationale BDS et la résistance qui défie l’impérialisme et le sionisme au Liban, Palestine et dans tous les pays occupés.

- Pour l’annulation immédiate et sans condition de la dette illégitime contractée par les dictatures et des accords d’associations signées avec l’Union européenne et les USA.

- Pour le refus des politiques de la casse sociale et d’austérité menées au nom des équilibres budgétaires, de la dette publique et des politiques de sauvetage des banques et des capitalistes. Nous refusons ces politiques qui précarisent la population, surexploitent les travailleurs, renforcent l’oppression des femmes et des jeunes, concentrent les richesses au profit d’une minorité.

- Pour le droit à la liberté de circulation et d’installation des migrants et la fermeture des centres de rétention. Pour la régularisation de tous les sans-papiers et le respect du droit d’asile. Pour l’abolition des accords sécuritaires déléguant aux pays du Sud la fonction d’alliés de l’Europe forteresse et des accords de Schengen.

- Pour le soutien des luttes démocratiques, culturelles, des chômeurs, des sans-droits et des opprimés. Dans la perspective d’une remise en cause du système capitaliste, il faut nécessairement combattre le système patriarcal. Nous soutenons toutes les luttes d’émancipation des femmes contre les oppressions qu’elles subissent.

- Pour le développement des luttes écologiques, nées du refus par nos peuples de l’appropriation par les grands groupes capitalistes, soutenus par les impérialismes, des biens communs comme l’eau, de la prédation des ressources énergétiques fossiles par les classes dominantes, de l’extraction des gaz de schiste et des risques majeurs entraînés par les centrales nucléaires.

Notre mouvement, le mouvement socialiste, est le seul capable de jouer un rôle moteur pour l’amplification, la convergence des luttes populaires et une vraie révolution vers l’égalité et la liberté. Bien entendu, le chemin sera long pour une véritable émancipation. Mais dès maintenant, il est nécessaire de développer la convergence des luttes, de renforcer la collaboration et le débat entre les courants anticapitalistes et révolutionnaires, de faire face ensemble à nos adversaires communs. Ces Rencontres anticapitalistes méditerranéennes ne sont qu’un début. Cette conférence envoie un message à tous les mouvements de masse et à tous les socialistes que seule leur unité dans le monde mènera à la victoire.

Signataires :

Chypre Nord New Chyprus (YKP)

Corse A manca

Égypte Parti socialiste, Renouveau socialiste, Socialistes révolutionnaires

État espagnol Izquierda anticapitaliste

France NPA

Grèce OKDE spartacos

Italie Sinistra critica

Irak Communist Union in Iraq, Irak Freedom Congress, Worker Communist P. Iraq, Worker Communist P. Kurdistan

Liban Parti communiste libanais, Union de la jeunesse démocrate libanaise

Maroc Al-Monadil, Solidarité alternative socialiste, Voie démocratique

Tunisie Ligue de la gauche ouvrière (LGO), Parti communiste des ouvriers de Tunisie (PCOT), Parti des travailleurs patriotes démocrates (PTPD), Patriotes démocrates