Le règlement définitif de la scission ouvre une nouvelle période : à présent, les compteurs sont remis à zéro, et chacun des deux « NPA » doit faire la preuve de son utilité. À l’échelle nationale comme locale, nous voyons que nous sommes face à des difficultés, à des niveaux différents, mais qui se conjuguent : échec des forums anticapitalistes et absence d’interlocuteurs avec qui construire un parti capable de nous dépasser, échec de l’alliance avec la FI, difficulté à nous reconstruire dans la jeunesse et dans le monde du travail.
Si nous ajoutons à ce premier constat un deuxième, présent dans la dernière résolution du CPN, qu’« il y a pourtant un enjeu à faire vivre notre courant, qui depuis plus d’un demi-siècle a su allier ce qui pourrait apparaître comme des contraires, à savoir un marxisme ouvert, non sectaire, dans une optique révolutionnaire et unitaire, la lutte contre l’exploitation et contre toutes les oppressions, un équilibre entre un héritage fort et une capacité d’intégrer les apports de chaque nouvelle génération militante », alors nous devons tirer jusqu’au bout la logique. Nous entrons dans une période où l’enjeu principal est la survie immédiate de notre organisation, et donc, de faire exister le NPA.
On répond souvent à cela : « il est nécessaire que la FI soit la première force de gauche face au PS social-libéral ». Et bien évidemment, il est encore plus déterminant de regrouper notre camp social face à l’extrême droite. Mais il y a un enjeu tout aussi grand à ce que le NPA survive : sa disparition serait une perte égale pour le mouvement ouvrier.
Or, notre effacement systématique derrière la FI, y compris quand les enjeux sont limités, comme pour ces Européennes où personne n’imagine que notre appel changera la donne, confine à l’absurde. En ce sens, nous pensons que le vote du CPN du 28 avril est une erreur.
À nos yeux, c’est tout le contraire qu’il faudrait faire : demeurer totalement indépendantE de la FI pour pouvoir mieux l’interpeller sur ses responsabilités politiques (son manque de volonté à regrouper autour d’elle, sa crise démocratique qui la mine durablement), tout en la soutenant face à l’extrême droite, et rappeler la nécessité d’unir notre camp social contre la répression. Dire cela, ce n’est pas dire qu’il faudrait attaquer la campagne de la FI, ni qu’aucun comité ne devrait mener cette campagne, encore une fois — cela dépend des réalités locales.
Dans ce contexte, notre objectif politique premier devrait être d’exister politiquement pendant la campagne des élections européennes, avec différentes tactiques en fonction des réalités locales. À ce titre, le soutien de Philippe Poutou à la campagne de la GA belge va dans le bon sens : elle permet à notre courant politique d’exister et de peser. Nous devrions la médiatiser au maximum, car dans les faits, elle nous donne une consistance politique en France.
C’est pourquoi, plutôt que d’adopter cette consigne de vote, nous aurions privilégié : 1. d’organiser une grande campagne de meetings avec nos porte-parole pour défendre nos perspectives politiques ; 2. avec pour débouché principal le fait d’inviter à notre université d’été les personnes qui s’y rendent, et dont la construction, conjointe avec la préparation du congrès de refondation, doit être notre priorité ; 3. de proposer un meeting unitaire et une manifestation contre la répression à l’ensemble du mouvement social, comme cela a été envisagé.
Ainsi, il y aurait eu une cohérence dans la mise en œuvre de notre orientation unitaire et révolutionnaire. Concernant la consigne de vote, nous considérions que s’il fallait en donner une, elle aurait été d’appeler à voter pour les listes qui apparaîtront comme de rupture avec le système, avec la macronie, le capitalisme, le racisme. Cela aurait pu notamment concerner la FI sans la nommer explicitement, ni s’y limiter.
Aurore Koechlin (Paris), Sally Brina (Orléans), Thomas (Cher)