Publié le Vendredi 1 avril 2011 à 17h53.

Louise Michel(1830-1905)

« Ce n’est pas une miette de pain,

c’est la moisson du monde entier qu’il faut à la race humaine, sans exploiteur

et sans exploité. »

« La révolution sera la floraison

de l’humanité comme l’amour

est la floraison du cœur »

Louise Michel – Mémoires – 1886.

Louise Michel est née le 29 mai 1830 en Haute-Marne au château de Vroncourt. Fille d’une femme de chambre et d’un châtelain, elle grandit dans la famille des parents paternels où elle reçoit une instruction exceptionnelle (encore plus pour une fille), imprégnée de l’esprit des Lumières, lisant Voltaire et Rousseau. Elle obtient son brevet de capacité et devient institutrice. Mais elle refuse de prêter serment à l’Empereur et ouvre une école privée en 1853. Elle pratique un enseignement inspiré des idées républicaines. Elle écrit des poèmes, rencontre Victor Hugo. Puis elle passe du rôle de spectatrice, écrivaine, émue, révoltée, humaniste et républicaine au rôle actif de militante et de révolutionnaire. Elle collabore aux journaux d’opposition, fréquente les réunions publiques, les blanquistes (Théophile Ferré) dont elle partage à cette époque les idées. Elle rencontre aussi les militants de l’Inter­na­tionale, Nathalie Lemel et Eugène Varlin : « La liberté passait sur le monde, l’Inter­nationale était sa voix criant par-dessus les frontières les revendications des déshérités. » L.M.

Elle est de tous les événements qui préparent la chute de l’Empire et de la Commune.

Louise Michel communarde

Après le 4 septembre, face à la trahison du gouvernement « de défense nationale », les travailleurs et le peuple de Paris organisent la résistance, le ravitaillement. Louise Michel participe aux deux comités de vigilance du 18e arrondissement.

Le 31 octobre 1870, elle est dans la grande manifestation, devant l’hôtel de ville. Elle écrit : « Alors comme on criait au 4septembre : Vive la République, on cria au 31 octobre Vive la Commune ! » La Commune n’a pas été proclamée, les Prus­siens continuent à envahir le territoire et à menacer Paris.

Louise est élue présidente du comité républicain de vigilance des citoyennes du 18e arrondissement. Elle crée une cantine pour ses élèves. Le 1er décembre 1870, elle est arrêtée à la suite d’une manifestation de femmes. Le 22 janvier 1871, munie d’un fusil, elle fait le coup de feu contre les mobiles bretons de Trochu devant l’Hôtel de Ville.

Le 18 mars, le comité de vigilance du 18earrondissement, que dirigent Ferré et Louise Michel, monte à l’assaut de la butte Montmartre où femmes, enfants, gardes fédérés entourent les soldats. Avec son ami Ferré ils sont de ceux qui pensent qu’il faut en finir maintenant avec le gouvernement de Versailles. Louise Michel. est volontaire pour se rendre seule à Versailles afin de tuer Thiers. La presse bourgeoise la surnomme « la Louve Rouge ». Thiers n’a alors que peu de troupes à opposer à la Commune, cela ne durera pas, l’occasion est manquée. Le Comité central ne voulant pas être tenu pour un usurpateur organise les élections qui se tiennent le 26 mars. La Commune est proclamée le 28 mars. Louise, clairvoyante, pense qu’il faut s’emparer de la banque.

À partir du 2 avril, elle se consacre essentiellement à la défense armée de la Commune. Elle participe en tant qu’ambu­lancière et combattante aux batailles de Clamart, du Fort d’Issy-les-Moulineaux, de Neuilly, en tant que garde au 61e bataillon de Montmartre. Militante féministe, elle insiste sur la place des cantinières, ambulancières, infirmières… Le 11 avril,se constitue l’Union des femmes pour la défense de Paris et les soins aux blessés avec Nathalie Lemel et Élisabeth Dmitrieff. Louise pense que la révolution ne peut pas se faire sans les femmes, mais aussi que l’émancipation des femmes ne peut se faire sans révolution. Elle insiste particu­lièrement sur quelques points : instruction égale, salaire égal, et « mariage libre, où l’homme ne sera plus le propriétaire de la femme ».

Louise Michel prend part aux derniers combats (barricade de Clignancourt) avant de se livrer pour libérer sa mère emprisonnée à sa place le 24 mai. Comme femme, elle échappe à la peine de mort. Elle est condamnée le 16 décembre 1871 à la déportation. Ayant vu mourir tous ses amis et surtout Ferré, elle réclame la mort au tribunal : « Puisqu’il semble que tout cœur qui bat pour la liberté n’a droit qu’à un peu de plomb, j’en réclame une part, moi ! Si vous me laissez vivre, je ne cesserai de crier vengeance, et je dénoncerai à la vengeance de mes frères les assassins de la commission des grâces... »

La déportation en Nouvelle-Calédonie

Le 28 août 1873, de La Rochelle, les dépor­tés sont embarqués sur le Virginie pour quatre mois de traversée.

Louise Michel reste sept années en Nouvelle-Calédonie, refusant de bénéficier d’un autre régime que celui des hommes, refusant toute remise de peine : elle veut être libérée « Avec tous ou jamais ». Au cours de ces années passées en Nouvelle-Calédonie elle est à la fois poète, musicienne, entomologiste, ethnologue, en plus de son métier d’institutrice… Anticolonialiste, elle crée le journal Petites Affiches de la Nouvelle-Calédonie et édite Légendes et chansons de gestes canaques. Elle cherche à instruire les autochtones canaques, à apprendre leur langue et, contrairement à certains communards qui s’associent à leur répression, elle prend leur défense lors de leur révolte noyée dans le sang en 1878. C’est pour deux canaques insurgés contre les blancs qu’elle divisera en deux son écharpe rouge de la Commune qu’elle avait réussi à conserver jusque-là. De même elle dénon­cera la politique d’expansion colo­niale menée par le républicain Jules Ferry : « Le gouvernement n’a plus d’abattoirs à Paris comme en 1871, mais il les a à Madagascar et au Tonkin ».

Jusqu’au bout militante infatigable

De retour à Paris le 9 novembre 1880, elle est chaleureusement accueillie par la foule. Elle y reprend son activité d’infatigable militante, donnant de nombreuses confé­rences, inter­venant dans les réunions politiques.

En 1882, désirant se dissocier des socialistes qu’elle juge autoritaires et parlementaires, elle adopte les idées anarchistes : « Plus de drapeau rouge mouillé du sang de nos soldats. J’arborerai le drapeau noir, portant le deuil de nos morts et de nos illusions ».

Ses conférences en France, en Angleterre, en Belgique et en Hollande se comptent par milliers. Organisation de manifestations, sou­tien aux grèves, refus de la peine de mort… surveillée, régulièrement emprisonnée…

Elle meurt le 9 janvier 1905 à Marseille d’une pneumonie lors d’une tournée de conférences. Le matin du 21 janvier à Paris, une foule de plusieurs milliers de personnes assiste à ses funérailles.

Dominique Pierre