Publié le Mercredi 17 juin 2020 à 11h48.

Les migrantEs n’ont toujours pas droit au déconfinement à Ouistreham 

Ouistreham est une petite ville située à une dizaine de kilomètres de Caen sur le littoral du Calvados. Elle abrite un port transManche d’une activité bien plus limitée que Calais, mais suffisante pour que des migrantEs y tentent leur chance : grimper dans un camion hors des regards en espérant passer en Grande-Bretagne.Le maire s’est illustré ces dernières années par des décisions inhumaines à leur égard, comme par exemple l’interdiction de facto d’accéder à un point d’eau. La préfecture, sur la même longueur d’onde, déploie régulièrement d’importantes forces de police et de gendarmerie, qui naguère allaient jusqu’à imprégner de gaz lacrymo les affaires des migrantEs qu’elles débusquaient dans des fourrés ou des bosquets. Mais cette violence et ce mépris n’ont pas empêché des habitantEs de se solidariser des migrantEs, de les aider à se nourrir, se vêtir ou se soigner. À plusieurs reprises, des manifestations ont eu lieu sur place. Et plus d’une fois, on a pu constater après coup un reflux de la pression policière à l’égard des migrantEs.

Brutalités et humiliations

La suite le montre, le temps est venu de battre à nouveau le pavé pour les migrantEs de Ouistreham. Le 20 mars, ils ont été confinés dans un hébergement ouvert à Tailleville, village situé à une douzaine de kilomètres. Un geste non dénué d’arrière-pensées : tant qu’ils et elles restent sur place, ils et elles ne peuvent tenter le passage. Le 11 mai, tout le monde a pu se déconfiner… sauf les migrantEs. Le rond-point où ils piquaient leurs tentes a été truffé de blocs de pierre par la mairie pour les empêcher d’y dormir. Les patrouilles du PSIG, l’équivalent gendarmesque de la BAC, multiplient les contrôles. Les migrantEs dénoncent de la brutalité, des humiliations. La dégradation des effets personnels a repris. Et les soutiens qui ont continué de tenter de les aider ont essuyé une pluie d’amendes de 135 euros pour avoir prétendument enfreint les règles sanitaires.

Lorsque les gendarmes interceptent les mineurEs, ils les ramènent à Tailleville, sous le fallacieux prétexte de leur protection. Vendredi 5 juin, une quinzaine d’entre eux a tenu courageusement un sit-in devant la gendarmerie de Ouistreham pour protester contre la détention d’un des leurs. Ils avaient de quoi avoir peur pour lui. Trois adultes ont récemment passé plusieurs jours en centre de rétention administrative à Oissel, avant d’être finalement libérés.

Une première manifestation a été appelée en urgence samedi 6 juin en fin d’après-midi à Ouistreham. En dépit d’un délai de moins de 48 heures, au moins 120 personnes ont manifesté sur le port. Samedi prochain, une nouvelle manifestation est appelée à Caen dans l’après-midi en défense des sans-papiers. Elle sera précédée le matin par une autre à Ouistreham. Si la même énergie que celle qui animait les cortèges pour George Floyd et Adama Traoré les deux derniers week-ends est au rendez-vous, la préfecture pourrait bien en rabattre sur son zèle anti-migrants.