Publié le Samedi 19 janvier 2013 à 09h21.

Cahuzac et la fiscalité : « La grande réforme fiscale est faite » ?

Fragilisé par l'affaire révélée par Mediapart (cf. Tout est à nous ! n° 176) Jérôme Cahuzac ministre du budget, a affirmé, lors de l’émission de France 2 Mots Croisés lundi 7 janvier, que la grande réforme fiscale promise par le candidat Hollande avait d’ores et déjà été faite… Sur ce terrain aussi, le gouvernement a renoncé.Il y un peu plus de deux ans, Hollande, qui n’était que candidat à l’investiture du PS, mettait au cœur de sa campagne la « révolution fiscale ». Inspiré par des économistes comme Thomas Piketty, il n'avait alors de cesse de prôner une réforme ambitieuse visant à remettre à plat toute la fiscalité française, avec comme objectif de « redistribuer justement et financer efficacement ». Mais ça, c’était il y a deux ans. Désormais au pouvoir, le président Hollande et tous ses ministres prônent « la stabilité fiscale ».Une réforme fiscale qui fait pschitt… À écouter Cahuzac, la grande réforme fiscale tant promise a été faite puisqu’une nouvelle tranche d’imposition à 45 % a été créé (alors que sous Giscard d’Estaing elle était à 60 %) et que les revenus du capital sont désormais taxés comme ceux du travail… Mais on est loin, très loin du compte, surtout qu’au final la grande réforme fiscale du gouvernement est en fait un amoncellement de renoncements.Le premier fut celui face « aux pigeons », concernant la taxation des plus-values de cessions mobilières qui mit un sacré coup à la volonté de taxer à égalité les revenus du capital et ceux des revenus. Le candidat Hollande voulait en finir avec les niches fiscales : dans les faits, il n’aura pas été très sévère à cet égard, puisque la loi de finances 2013 prévoit 70,7 milliards d'euros de niches, contre 70,8 dans celle de 2012. Pire, celles permettant une réelle défiscalisation des plus riches, comme les niches outre-mer, n’ont même pas été sujettes au coup de rabot ni au plafond global. Nous avons eu le droit également à un « pas de deux » sur l’incorporation des œuvres d’art dans le patrimoine soumis à l'impôt sur la fortune. Ce ne sera finalement pas le cas, le gouvernement ayant renoncé, devant le tollé déclenché. On peut encore citer le cas des résidences secondaires, que le gouvernement envisageait de soumettre à la contribution à l’audiovisuel public. Mais il y a également renoncé, ouvrant la voie à une hausse de ladite contribution, de l'ordre de 6 euros.Hollande garant des plus richesN’en déplaise à M. Cahuzac, le gouvernement Ayrault n’a en rien procédé à une « grande réforme fiscale » et encore moins à une politique confiscatoire comme voudrait nous faire croire la droite et certaines personnalités. Par contre, il a maintenu le gel du barème de l’impôt sur le revenu  qui augmentera la charge de 16 millions de foyers fiscaux, bien au-delà donc des riches, et même de ce que l'on appelle communément les « classes moyennes », et rapportera beaucoup plus à l'État. Le système fiscal français restera donc scandaleusement défavorable au plus grand nombre et continuera d’épargner les revenus du capital.Loin d'être les auto-proclamés ennemis de la finance tel qu'ils s'étaient mis en scène dans le cadre de la campagne présidentielle, le PS et le gouvernement s’affichent aujourd’hui comme leurs véritables garants.Sandra Demarcq