À la veille d'un Conseil européen traitant de l'évasion fiscale, le ministre du Budget, Bernard Cazeneuve, a voulu se montrer ferme contre les fraudeurs. Dans une interview donnée au Parisien, il est revenu sur le projet de loi du gouvernement qui sera présenté au Parlement dans quelques semaines. « Il n’y aura ni amnistie ni cellule de régularisation [des fraudeurs]. Il doit y avoir un processus transparent, de droit commun, leur permettant de se mettre en conformité avec la loi. Il n’y aura donc aucune disposition dérogatoire ». Et Pierre Moscovici, le grand argentier, d'en rajouter : « La finalité n'est pas de faire un cadeau aux exilés ».
Les deux ministres font mine de bomber le torse, mais la baudruche se dégonfle bien vite. Ce dont il est ici question, ce n'est pas de prendre les mesures autoritaires pourtant nécessaires afin de récupérer les 60 à 80 milliards d'euros qui chaque année échappe à l’État (de 16 à 22 % des recettes fiscales brutes de 2012, d'après le syndicat Solidaires-finances publiques). Non, que les grands fraudeurs, avec à leur tête les entreprises, se rassurent : il s'agit tout simplement de continuer une pratique… finalement très favorable aux fraudeurs ! Comme l'explique Moscovici lui-même, « Dès lors que quelqu'un est exilé fiscal, l'objectif est de le faire revenir (…) Il faut mettre en place des discussions avec le fisc pour trouver un accord dans le respect du droit (…) Les fraudeurs devront rembourser 60 % des sommes dissimulées ». Curieux droit des puissants. Et ce n'est pas la maigre cinquantaine d'agents supplémentaires recrutés pour la lutte contre la fraude fiscale qui aideront à régler le problème.
Quelques semaines après l'affaire Cahuzac, rien de bien neuf donc. Pour récupérer les fortunes dérobées au fisc et les mettre au service de la collectivité, les mesures sont pourtant connues : lever le secret bancaire, et mettre les banques sous le contrôle des salariés et de la population. En un mot, socialiser.Qu'il soit fiscal ou autres, c'est sûr, les puissants et leurs amis du gouvernement ne l'emporteront pas au paradis !
Manu Bichindaritz