Embourbé dans le scandale du syndicat Avenir lycéen, affaibli par les défections à la chaîne du Grenelle de l’éducation, Blanquer est dos au mur. Il n’en est que plus dangereux : il tire à vue, éparpillant façon puzzle l’éducation prioritaire ou réprimant ceux qui osent résister à sa politique.
La première fédération syndicale de l’éducation, pourtant habituellement très prudente, juge que « le discrédit du ministre est total ». Il faut dire que le #blanquergate, ce n’est pas rien : détourner de l’argent public pour s’acheter, à grands frais, un fan-club de lycéens prêts à jouer les VRP de luxe des réformes du ministre, c’est le genre de chose qui devrait normalement conduire un ministre à démissionner…
Sauf que Blanquer n’est pas n’importe quel ministre. La gestion de ce scandale par le gouvernement révèle qu’il est l’une des pièces maîtresses du macronisme, que le Roi ne peut se permettre de perdre.
Tous les moyens sont bons pour détourner l’attention. Ainsi, traiter Mediapart, Libération et le SNES de suppôts du bolchévisme, comme au bon vieux temps de la guerre froide. Ou encore lancer une enquête administrative sur les comptes… des autres syndicats lycéens, comme l’UNL !
Sacrifier l’éducation prioritaire
Mais le pire, c’est le contrefeu des annonces sur l’éducation prioritaire, au lendemain même des révélations de Libération. Certes la secrétaire d’État Nathalie Elimas n’a fait que confirmer ce que l’on craignait, mais ces annonces ont surpris par leur précocité. Cette accélération du calendrier ne s’explique que par la volonté d’étouffer un scandale en en créant un autre. Une politique du pire…
De quoi s’agit-il ? Tout simplement de dissoudre tous les réseaux d’éducation prioritaire, ou REP, et de répartir leurs moyens sur toute une diversité d’établissements, défavorisés, isolés ou ruraux, sur la base de contrats avec les rectorats. Une politique perverse à plus d’un titre. D’abord parce qu’elle nie les besoins spécifiques des quartiers populaires. En cohérence avec la philosophie de Blanquer, qui s’est construite contre l’idée que la condition sociale pouvait avoir une influence sur le devenir scolaire.
Quant à la contractualisation des moyens, il s’agit bien évidemment d’un pas en avant vers un modèle de management libéral de l’éducation nationale, qui explose toutes les normes et les garanties collectives, pour aller vers davantage d’austérité.
Les AED relancent la mobilisation
Heureusement, il existe des raisons d’espérer. Les assistantEs d’éducation, que l’on avait déjà vus fortement mobilisés lors des grèves de novembre, ont créé la surprise le 1er décembre, avec une mobilisation qui s’est construite largement en marge des appareils syndicaux. Fortement exposés au Covid depuis le début de la crise, dépourvus de moyens, privés de primes, de stabilité, de formation, de conditions de travail décentes, leur colère est à la hauteur de l’injustice qu’ils et elles subissent.
Car pour virer Blanquer, et surtout mettre un terme à la politique qu’il incarne si bien, l’indignation médiatique ne suffira pas. Il faut recréer les conditions d’une mobilisation massive des personnels pour de meilleures conditions de travail et d’apprentissage, et pour une autre école.