Les salariés de l’usine M-Real à Alizay (Eure) ont peut-être trouvé un repreneur.« Deux mois pour réussir », titrait récemment le quotidien Paris-Normandie. Pourtant il y a sept mois, quand a commencé la bagarre pour le redémarrage de l’usine de pâte à papier M-Real, à Alizay (Eure), tous les médias avaient déjà enterré la boîte et ses travailleurs. Mais aujourd’hui, la perspective du rachat par un groupe industriel papetier est devenue une éventualité sérieuse, car des négociations discrètes sont entamées. C’est une fois de plus la preuve que celui qui lutte peut gagner, tandis que celui qui baisse les bras a déjà perdu. En jetant un œil dans le rétroviseur, on y voit d’abord la constitution d’un collectif, dont la pétition « pour le redémarrage, le maintien et le développement de l’emploi chez M-Real » avait reçu le soutien de toute la gauche, puis de nombreuses équipes municipales. Elle a été massivement signée, ce qui a contribué à battre en brèche le fatalisme général dans l’usine. Ensuite, à partir de l’annonce du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) de 99 personnes sur 416 en décembre, les initiatives n’ont pas manqué : diverses formes de blocage de l’usine et manifestations combatives, bien évidemment, mais aussi un travail de démonstration économique de la viabilité du site d’Alizay, et des propositions argumentées de mise en place d’autres productions… Le tout en maintenant le cap sur l’exigence d’interdiction des licenciements, chez M-Real comme ailleurs, et de restitution des aides publiques, avec mise au pied du mur, en profitant de la campagne des régionales pour interpeller les pouvoirs publics et les responsables politiques. Deux mois pour réussir ? Ce qui est certain, c’est que le report du PSE d’un mois et demi, arraché par la mobilisation, vient d’arriver à échéance. Le 29 avril, lors de la deuxième table ronde officielle, tous les « acteurs » (dont le NPA) ont entendu les rapports des expertises technique, économique et financière : la production de pâte couplée à celle de papier est rentable, le groupe fait supporter au site 25 millions d’euros de charges indues par an pour créer un déficit artificiel, l’emploi pourrait même être développé facilement avec d’autres productions comme le bioéthanol ou de la pâte textile. À tel point que la préfète a affirmé que « si M-Real ne veut pas assurer l’avenir de ce site industriel, qu’il le vende et s’en aille élégamment ! », repris dans une belle unanimité par tous les élus et officiels présents. Le hic, c’est qu’aucun d’entre eux n’est prêt à toucher au sacro-saint droit de propriété pour exproprier le groupe M-Real si d’aventure il faisait le choix de faire échouer la transaction pour empêcher le développement d’un concurrent… Alors le 30 avril, dans une opération « usine morte », une manifestation a empêché le comité d’entreprise (CE) de se tenir. Le combat continue, le NPA y tient toute sa place, en particulier avec Thierry Philippot, secrétaire du CE, avec un bulletin régulier et, bien sûr, en participant à l’animation du collectif unitaire, aux côtés du PCF surtout, avec aussi le PS et les Verts, pour démontrer que la lutte peut payer. Correspondants