Chez SFR, la mobilisation des salariéEs contre la restructuration du groupe s’étend, « dopée » par la présentation par la direction d’un plan de départ "volontaire" qui prévoit plusieurs milliers de suppression de postes de travail.
La mise en œuvre de ce plan s’inscrit dans le prolongement des restructurations associées au rapprochement avec Numericable, avec une prévision de 5 000 suppressions de postes.
Une colère qui se propage
En juin dernier puis en septembre, les salariéEs s’étaient mobilisés contre la dégradation des conditions de travail, la baisse de la prime d’intéressement et les premières annonces de suppressions de postes, notamment dans le secteur de la distribution, les boutiques et chez les employéEs de SFR Business Solutions aux Ulis.
L’accalmie n’aura duré que quelques mois, et depuis plusieurs jours, les grèves se multiplient. Dans les secteurs qui se mobilisent, on trouve d’abord ceux de la distribution, c’est-à-dire les boutiques. Ainsi, le week-end dernier, de nombreux salariés des boutiques SFR en Bretagne (Quimper, Brest, Lorient, Rennes, etc.) ont manifesté, dénonçant les baisses de salaires et de primes, surcharges de travail, objectifs délirants et les plans de départs « volontaires ». Les syndicats CGT, CFDT, Unsa, CFE-CGC et CFTC multiplient les appels à la grève à Nantes, Évreux ou Reims… Selon la CGT, certains vendeurs qui travaillent 39 heures par semaine ne gagne plus que 900 euros par mois.
Mais c’est l’annonce du projet de l'externalisation dans le pôle Télécom ainsi que la baisse de rémunération des salariéEs de Completel qui a déclenché la grève en cours depuis début avril. Il s’agit principalement du réseau qui vient de l’ex-Numericable, géré par Completel, réseau qui n’a pas fusionné avec celui de SFR. Techniquement trop compliqué à faire rapidement... mais qui représente aussi des avantages fiscaux du fait des pertes qui font baisser l’imposition.
Toutes et tous sont frappéEs
Dans le détail, ce plan prévoit la suppression de 1 974 postes chez SFR SA, soit 26 %, de 612 postes chez SFR Service Client, soit 53 %, de 191 postes chez Numericable, soit 38 %, de 181 postes chez Completel, soit 37 %. D’autres entreprises du groupe sont également sous la menace du plan social : Futur (77 %), SFR collectivités (31 %), OMEA (46 %), etc. Toutes les régions sont concernées, avec des suppressions de l’ordre de 53 % à Rennes, 51 % à Nantes, 46 % pour Aix-Marseille, 26 % pour l’Île-de-France, 24 % pour Lyon, 22 % pour Bordeaux et 19 % pour Toulouse.
Mardi dernier, le 4 avril, à l’annonce du projet de la direction, les salariéEs se sont mis massivement en grève dans deux services basés à La Plaine Saint-Denis, comptant au total plus d’une centaine de salariéEs. Ces technicienEs, qui tournent en trois équipes de 8 heures pour assurer une rotation 24 heures sur 24, se sont également relayés sur le piquet de grève, avec 100 % des effectifs mobilisés sur chacune des équipes. L’un des deux services, qui compte environ 25 salariéEs, a même reconduit le mouvement et se déclare actuellement en « grève illimitée et reconductible ».
Cependant, dans une partie de l’entreprise, l’attitude est plutôt celle du « sauve qui peut », en prenant les indemnités complémentaires de licenciement qui sont importantes par rapport à d’autres entreprises. C’est le prix que Drahi paie pour faire des économies dans une masse salariale de l’ordre de 300 millions d’euros/an. Lorsque l’on pose la question au directeur financier en réunion du comité central d’entreprise, il prétend bien évidement ne pas savoir... Pour d’autres externalisé, trimbalés de déménagement en déménagement, c’est la dégradation des conditions de travail et l’allongement des temps de trajet.
Briser le mur du silence pour gagner
Au total, la restructuration de SFR est faite de filialisations, de suppressions des emplois, et de surexploitation des salariéEs pour sortir de la baisse des profits de la branche Télécom, un marché saturé qui demande de forts investissement pour être compétitifs. L’objectif de Drahi est d’arriver à une marge de 45 % par an. Actuellement SFR est à 35 % par an, ce qui est similaire pour Orange et Free. Pourtant exceptionnel par rapport à bien d’autres secteurs économiques...
Et c’est bien l’enjeu des mobilisations actuelles : s’opposer à une régression sociale qui frappe tous les secteurs d’une entreprise où les traditions d’organisations et de luttes sont faibles et battues en brèche par une organisation du travail et de l’entreprise qui fractionne les collectifs de travail. Et dans un groupe qui détient les principaux médias et la quasi-totalité du câble français, lorsque des salariéEs du groupe se mobilisent, se mettent en grève, l’information est peu relayée dans les grands médias...
Robert Pelletier