L’offensive des troupes de l’OTAN, dans le sud du pays, devait préparer la mise en place d’un pouvoir « légitimement » élu. Mais l’échec militaire pourrait bien préparer l’échec politique. Moment clé pour la stratégie d’Obama.
La deuxième élection présidentielle depuis l’occupation des troupes américaines et de leurs alliés aura lieu le 20 août. Les tensions et la violence ne cessent de s’exacerber, ces derniers mois, et les attentats se multiplient ; l’été afghan s’annonce le plus sanglant depuis la chute des talibans.
La population en est la première victime, à la misère s’ajoute une insécurité croissante. Le pouvoir corrompu est isolé et les talibans renforcent leur influence jusqu’aux portes de Kaboul.
L’offensive militaire déclenchée par Obama dans la province d’Helmand, au Sud, est loin d’être un succès et entraîne de lourdes pertes, en particulier pour les troupes britanniques. Les signes de démoralisation se multiplient. Loin de maîtriser la situation, incapables de trouver de réels appuis, les armées d’occupation traitent avec les talibans et les seigneurs de guerre, par la pression des armes et de la corruption, renforçant les pouvoirs d’une clique de chefs locaux et de leurs milices qui rançonnent la population. Les ONG, qui gèrent 80% de l’aide internationale, traitent avec eux, fournissant largement les fonds de la corruption généralisée.
Quelque soit le résultat, l’élection à venir apparaît comme une mascarade démocratique, bien incapable de mettre en place un pouvoir avec une quelconque autorité. Les talibans menacent d’en empêcher le déroulement. 41 candidats sont déclarés mais l’essentiel de la campagne électorale se résume à des tractations avec les seigneurs de guerre, en échange de postes et de trafics garantis.
Dans cette bataille, l’actuel président, Hamid Karzaï, apparaît le plus à même de s’imposer, sous la houlette des américains, comme il l’avait déjà fait au lendemain de la chute des talibans. Il est en train de construire une nouvelle alliance de seigneurs de guerre pour se partager les pouvoirs locaux. Il aurait ainsi négocié un accord avec un ancien chef d’une organisation islamiste, Hekmatyar. Celui-ci a combattu les troupes de l’OTAN aux côtés des talibans, est poursuivi comme terroriste par les Américains et s’est engagé à déposer les armes en échange de ministres, de gouverneurs locaux et d’une aide financière.
La démocratie, à l’ombre des armées, revêt le masque sinistre de la violence et de la corruption.
Les difficultés rencontrées par les armées de l’OTAN, la crise provoquée par l’extension du conflit au Pakistan et la généralisation de la corruption créent un climat de démoralisation parmi les troupes elles-mêmes. La nouvelle stratégie d’Obama agit à l’opposé du but espéré. L’instabilité cède la place à une décomposition morale et politique, pour en démontrer l’échec. Même aux Etats-Unis, la contestation grandit face à cette sale guerre qui devient « le Vietnam d’Obama ».
Yvan Lemaitre