Une semaine avant le tragique accident de train de Tèmbi (au moins 57 morts), le ministre des Transports (qui a depuis démissionné) Karamanlis se vantait, en réponse à Syriza, de la sécurité totale des chemins de fer grecs. Interrogé il y a quelques jours sur ces propos, le ministre d’extrême droite Georgiadis a osé répondre que c’était bien cela qu’il fallait dire, sinon plus personne n’aurait osé prendre le train…
Voilà de quoi est fait le gouvernement ultra-libéral de Mitsotakis, et le cynique morbide Georgiadis reste en place. On comprend d’autant mieux le dégoût et la colère qui se sont emparées de la population. Le Premier ministre n’a qu’un but : écarter sa propre responsabilité, chargeant l’ex ministre Karamanlis et trois ou quatre cadres d’OSE (société des chemins de fer) mais clamant aussi « Nous sommes tous responsables » ou faisant pleurer devant les caméras toutes les larmes de crocodile de son conseil des ministres. Spectacle outrageant pour les familles des victimes et la population — traduit dans le slogan des dernières manifs « Prenez ce gouvernement et foutez le camp, ouste ! » — d’autant que le vrai souci de la droite est de repousser les élections législatives prévues pour début avril en espérant que la colère sera retombée.
Une colère irrépressible
La police a beau réprimer, depuis le mercredi 1er mars, les manifestations de colère sont quotidiennes dans tout le pays et, la semaine dernière, les mobilisations du 8 mars ont été une véritable marée humaine : loin des 60 000 annoncés dans les médias français pour tout le pays, ce sont des centaines de milliers de manifestantEs qui ont bloqué 80 villes du pays, avec 100 000 à 150 000 à Athènes, 50 000 à Salonique, 10 000 à 15 000 dans plusieurs villes comme Larissa, Patras… Et cela à l’appel de la Confédération des syndicats des fonctionnaires publics (ADEDY), des UL, de la fraction syndicale PAME du KKE (PC grec), des syndicats de base, d’unions de commerçants, mais sans la GSEE (privé) qui préférait tenir son congrès. Et malgré les provocations policières, le soir se sont déroulées de grosses manifs de femmes, et les jours suivants des manifs d’étudiantEs et lycéenEs ont eu lieu, avec des occupations (présidence de l’université d’Athènes). Le dimanche 12, d’impressionnantes manifs ont de nouveau eu lieu dans le pays, avec un thème récurrent : « Privatisations, pauvreté, morts, voilà la politique de Mitsotakis ».
Quelles perspectives ?
Alors que même les journaux les moins stupides de la droite pointent la responsabilité de l’actuel gouvernement, qui a méprisé les alertes des syndicats cheminots sur la catastrophe à venir, alors que le mouvement social dénonce les milliers de flics recrutés et le refus récent de recruter 200 cheminotEs indispensables, il est indispensable que la gauche prenne ses responsabilités à la hauteur de l’extraordinaire vague de colère qui repose sur quatre années de casse sociale et de violence, contre la jeunesse et les réfugiéEs en particulier, et sur la démolition du service public. Au-delà de la seule dénonciation du tout-privatisation, une revendication clé est celle de la renationalisation des chemins de fer, sans rachat ni indemnités, et sous contrôle des travailleurEs. Seules des coordinations étudiantes et la gauche anticapitaliste la portent en ce moment. Peut-être le 16 mars, nouvelle grande journée nationale d’action, sera l’occasion d’imposer cette revendication, contre les Mitsotakis, Georgiadis et leurs donneurs d’ordre en Grèce ou à Bruxelles…
À Athènes