Publié le Jeudi 5 avril 2012 à 21h26.

Iran : la crise s’intensifie

Marasme économique, crise sociale et intensification de la répression sur fond d’une crise de régime qui n’en finit pas, la République islamique d’Iran perd de jour en jour sa légitimité aux yeux de la population. Les indicateurs sociaux et économiques présentent une situation de décrochage.

Le 14 mars dernier, lors d’un discours devant le Parlement pour défendre son bilan, Mahmoud Ahmadinejad a prétendu que l’inflation était de 30 % au lieu des 21 % annoncés officiellement. 

En réalité, l’inflation annuelle se situe autour de 60 %. La hausse des prix est le résultat de la politique menée par le gouvernement et de la « réforme » des subventions aux produits de première nécessité. Une politique qui s’inspire des recommandations du FMI et qui dégrade considérablement les conditions de vie de la population. Le pouvoir a tenté de juguler la montée du mécontentement populaire en étalant sur cinq ans les suppressions de subventions sur le sucre, le blé, le riz, le lait, l’eau, l’électricité, l’essence et le gazole. Il a même mis en place des aides compensatoires versées aux plus pauvres, censées couvrir 50 à 70 % des augmentations sur les produits de bases mais qui ont été largement absorbées par l’inflation.

Le chômage a explosé et se situe officiellement à 14,5 % mais la réalité, selon les économistes indépendants, est plus proche des 25 %. Le rial, la monnaie iranienne, a perdu 55 % de sa valeur par rapport au dollar depuis un an. Et la perspective n’est guère reluisante, car les sanctions internationales décidées pour peser sur le programme nucléaire de l’Iran commencent à peser sévèrement. Les mesures prises par les grandes puissances impérialistes réduisent fortement les possibilités d’emprunts sur le marché du crédit et empêchent le secteur industriel de se procurer les pièces nécessaires à son bon fonctionnement. Du coup, les licenciements et les arriérés de salaires explosent.

Seule l’industrie de l’armement sous contrôle direct du corps des Gardiens de la Révolution échappe au délabrement généralisé. Ce secteur bénéficie d’ailleurs de toutes les largesses du pouvoir, et son budget représente plus du quart du budget national. Il faut se rappeler que le pays détient 10 % des réserves pétrolières mondiales prouvées (ce qui le place au 3e rang mondial) et que, faute d’investissement, l’Iran importe plus de 50 % de l’essence et du gazole utilisés.

Pire, le régime de Téhéran se prépare à passer un été pour le moins difficile. Dès le 1er juillet prochain, les pays européens n’achèteront plus de pétrole à l’Iran. Une manne financière non négligeable dont va devoir se passer Téhéran, qui tire 80 % de ses rentrées en devises de ses exportations d’or noir... sauf s’il consent à mettre un terme à son enrichissement d’uranium. Le pouvoir prévoit pour l’été une hausse de 30 % des prix de l’essence, du gazole et du fioul.

Dans ce contexte de crise généralisée et malgré une répression féroce, les luttes de résistance et les grèves se développent. À chaque fois, les meneurs et les militants syndicaux sont arrêtés, subissent des conditions de détention des plus humiliantes et sont lourdement sanctionnés. Le régime accentue la répression afin de contenir la contestation sociale qui pourrait dans les prochains mois prendre la forme d’émeutes de la faim. La crainte du pouvoir est de voir les revendications sociales rallumer les braises du mouvement démocratique qui avait secoué le pays après les élections truquées de 2009. La République islamique vient de signer un nouveau contrat de 120 millions de dollars avec la Chine pour l’achat d’un système de contrôle des flux téléphoniques et du réseau Internet. La coopération internationale en ce domaine est riche et les entreprises françaises y participent sans ménagement. Le guide Ali Khameneï a ordonné la mise en place d’un intranet à l’échelle du pays. D’ailleurs, le corps des Gardiens de la Révolution est actionnaire majoritaire de la compagnie de télécommunications depuis l’été 2009...

Face à la dictature des mollahs et à la répression toujours plus violente, de nombreuses campagnes de solidarité internationale existent. Nous devons les amplifier.

Babak Kia

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