Retour sur les postures successives de Macron vis-à-vis de la révolte en Iran.
Quelques jours jours après l’assassinat de Masha Jina Amini et alors qu’une répression impitoyable prenait son essor, les présidents français et iranien organisaient une rencontre fortement médiatisée, fin septembre, en marge de l’Assemblée générale de l’ONU.
D’après le communiqué de l’Élysée, Macron se serait limité à y évoquer « le choc qui a été le sien à la nouvelle de la mort de Mahsa Amini » et aurait « insisté sur la nécessité qu’une enquête transparente fasse la lumière sur ce drame ». C’est-à-dire à peu près la même chose que les autorités iraniennes.
Dès le lendemain, des photos les montrant en train de se serrer chaleureusement la main faisaient le tour du monde, et figuraient notamment en première page de la presse iranienne. Le journal Javan, proche des Gardiens de la révolution, le corps militarisé situé au cœur du pouvoir théocratique, faisait pour sa part l’éloge de Macron.
Une certaine opposition
Depuis, cet épisode colle à la peau du président français comme le sparadrap du capitaine Haddock. Et ses tentatives ultérieures de se justifier, notamment le 12 octobre sur France 2, n’ont pas convaincu grand monde.
Macron a donc décidé de frapper en grand coup en médiatisant une nouvelle posture : être le premier chef d’État d’une grande puissance à recevoir officiellement des opposantes iraniennes de la diaspora.
En tête de la délégation reçue à l’Élysée le 11 novembre, figurait Masih Alinejad qui vit aux États-Unis depuis 2009. Elle s’est fait connaître par ses campagnes contre l’obligation pour les femmes iraniennes de porter le voile en public. Cela ne l’empêche pas d’avoir de très bonnes relations avec la droite pro-Trump farouchement opposée au droit à l’avortement.
Masih Alinejad est par ailleurs directrice et productrice sur Voice of America Persian Service, l’organe médiatique du pouvoir étatsunien en direction de l’Iran et de sa diaspora. Elle intervient par ailleurs régulièrement sur Manoto TV, une chaîne satellitaire basée à Londres d’orientation ouvertement monarchiste.
La presse française a révélé que toute cette réception à l’Élysée a été montée par Bernard-Henri Lévy et son ami le milliardaire étatsunien Thomas S. Kaplan.
S’opposer aux manœuvres impérialistes
Au-delà des zigzags médiatisés dont Emmanuel Macron est coutumier, cette affaire semble indiquer que, pour les puissants de ce monde, l’avenir du régime iranien est loin d’être assuré.
En effet, d’une part, les mobilisations persistent depuis deux mois ; d’autre part, les possibilités d’une auto-réforme du régime ne sont plus crédibles.
Face au spectre d’une possible révolution politique et sociale, les milieux dominants du monde entier semblent être à la recherche d’une solution politique sauvegardant leurs intérêts fondamentaux.
Il faut garder en mémoire que c’est le pouvoir étatsunien qui avait organisé le coup d’État de 1953 contre le gouvernement Mossadegh, lequel avait eu l’impudence d’avoir nationalisé les compagnies pétrolières occidentales.
De la même façon, ce sont les chefs d’État de France, d’Allemagne, du Royaume-Uni et des États-Unis qui ont soutenu, en janvier 1979 lors de la Conférence de la Guadeloupe, le départ en exil du Chah et son remplacement par l’ayatollah Khomeny.
Dans le contexte actuel, la constitution d’un Conseil de transition rassemblant les courants historiques de l’opposition iranienne dont les royalistes, formulé notamment par Masih Alinejad, pourrait être une des pièces d’un dispositif actuellement à l’étude.
D’où la nécessité pour les révolutionnaires du monde entier de :
– développer une solidarité militante avec les luttes des exploitéEs et oppriméEs d’Iran ;
– reprendre les slogans essentiels des manifestantEs, et notamment « Ni Mollahs - Ni Chah » ;
– s’opposer aux manœuvres impérialistes voulant imposer leurs projets aux populations concernées.