Berlusconi parti, il s’agit de construire l’opposition au nouveau gouvernement.
Berlusconi est enfin parti ! Après dix-sept ans, c’est tout un cycle politique qui se termine, et les fêtes dans les rues, samedi, le soir de sa démission, exprimaient une attente trop longue qui dépassait les dynamiques de la politique des partis institutionnels, d’ailleurs surpris (et certains bien énervés) par le caractère spontané de la fête.
L’ère bersluconienne était potentiellement achevée depuis la rupture avec le président de l’Assemblée nationale, Fini, en décembre 2010, les scandales qui ont marqué tout son dernier gouvernement, et surtout les défaites électorales aux élections municipales et régionales du printemps passé et lors du référendum contre le nucléaire, pour l’eau publique et contre l’immunité pénale du président du Conseil, en juin. Et encore, le gouvernement tombe à cause d’une crise économique dont il n’a pas compris la portée et à laquelle il n’a pas su répondre, y compris du point de vue du patronat, sinon avec des attaques sévères contre les droits des travailleurs.
Il faudra du temps et de la distance pour tirer un vrai bilan de ces dix-sept années, mais il est évident qu’aujourd’hui c’est un voile qui se déchire et la politique italienne pourra en revenir aux débats sur les programmes, les contenus et les recettes stratégiques plutôt que de se contenter de se déterminer entre pro et anti-Berlusconi. Ce piège a d’ailleurs pas mal contribué, avec beaucoup d’erreurs et d’ambiguïtés stratégiques, à la défaite de la gauche radicale italienne qui a été dominée par « l’exigence » de construire le « front démocratique » contre Berlusconi.
Cela pourra peut-être aider à clarifier aussi la nature du nouveau gouvernement d’unité nationale, s’il arrive à voir le jour, qui devrait être appuyé par toutes les forces parlementaires à l’exception de la Ligue du Nord. Le gouvernement Monti (éminent technocrate, ancien commissaire de l’UE) a un programme très clair, identique à celui de la Confindustria (Medef local) et de la BCE, peut-être un peu édulcoré par une « équité » qui signifiera faire payer aux travailleurs davantage que ce qui sera payé par les entreprises et les banques. L’impôt sur la fortune, dont on parle, ne représentera d’ailleurs qu’une redistribution de ressources vers le capital, en prenant aux rentes et aux revenus pour financer les banques et la finance.
Il est donc impératif d’organiser l’opposition la plus forte et la plus large possible contre le nouveau gouvernement et les recettes antisociales à la grecque qu’il veut adopter (augmentation de l’âge de la retraite, réduction des salaires du secteur public, possibilité de licenciement dans le public, privatisations ultérieures...).
Quelle opposition ? Avec qui ? Comment ? La société italienne, comme elle l’a démontré le 15 octobre et au moment de la fête pour la démission de Berlusconi, n’est pas dans ce schéma et il faudra œuvrer dans tous les mouvements sociaux, parmi les forces syndicales et politiques radicales, pour construire un front unitaire qui se batte contre le nouveau gouvernement, qui ne tardera pas à montrer son vrai visage à de larges parties de la population.
Une époque vient de se terminer et celle qui s’ouvre reste à découvrir, mais une chose est déjà claire : il faudra construire un point de vue de classe, anticapitaliste, écologiste, féministe à la hauteur de la période.
Flavia D’Angeli, porte-parole de Sinistra Critica