Silvio Berlusconi est décédé. Le magnat des médias italiens, l’anti-communiste par excellence, méprisant la culture et la politique qu’il aimait définir comme « jacobine », le trois fois président du Conseil et leader de Forza Italia s’est éteint en clôturant, on l’espère, un gros chapitre de l’histoire du capitalisme en Italie, sans aucun doute le plus pourri.
Son parti avait été créé un an après les attentats meurtriers en 1992 des juges palermitains Falcone et Borsellino, les symboles de la lutte contre la mafia. M. Dell’Utri, créateur du parti et ami intime de Berlusconi, a depuis été condamné lors d’un procès historique sur les liens entre l’État et la mafia et reconnu par les juges comme figure de médiateur entre Cosa Nostra et Berlusconi. Le « Cavaliere » a été impliqué dans une infinité de procès dont la plupart des condamnations ont été habilement esquivées grâce à son pouvoir politique et économique.
Sa figure, tristement associée à l’italianité, incarne le pire : concentration du capital, monopole médiatique, corruption, mafia, domination masculine, mythe de l’entrepreneur, populisme télévisé… Ayant démarré dans l’industrie du béton, dont les activités ont permis de blanchir l’argent de Cosa Nostra, Berlusconi avait ensuite mis les mains dans tous les secteurs de l’industrie culturelle, de la grande distribution et même du football à la suite de l’achat du Milan AC, bastion populaire de la ville. Son nom figurait dans la loge P2 (celle de Licio Gelli), une vaste organisation criminelle dont l’objectif était une refonte conservatrice et autoritaire du système politique du pays.
Les journaux italiens affirment qu’il est difficile d’imaginer un monde sans Berlusconi ! Ils ont raison. Il est le reflet caricatural mais fidèle d’une société capitaliste où règnent les abus, les privilèges, l’exploitation économique, l’instrumentalisation du corps de la femme et la concentration des pouvoirs. La mort de Berlusconi ne signe pas la fin de ce monde… qu’il reste à changer de fond en comble.