Existe-t-il encore des colonies françaises dans le monde ?
Oui, presque trois millions d’hommes et de femmes vivent dans les derniers territoires subsistant de l’Empire colonial de la France, des territoires appelés DROM (département et région d’outre-mer) ou COM (collectivités d’outre-mer). Les plus importants sont dans la Caraïbe (Martinique, Guadeloupe, Saint-Barthélemy et Saint-Martin), en Amérique latine (Guyane), dans l’océan Indien (Réunion, Mayotte) et dans le Pacifique (Kanaky, la Polynésie dite française). Il faut également y ajouter la Corse, achetée et occupée militairement sous le Premier Empire.
La seule consultation concernant l’indépendance de ces territoires fut celle de 1974 dans les îles des Comores... où les Comoriens se prononcèrent à 96 % pour l’indépendance ! Malgré plusieurs résolutions de condamnation de l’ONU, l’État français décida de séparer Mayotte (où le non avait été majoritaire grâce aux populations françaises) des autres îles des Comores et de la maintenir comme possession française.
De nombreuses luttes furent menées pendant des dizaines d’années, avec d’importantes grèves générales, en particulier dans les Antilles, et la lutte prolongée des Kanaks, notamment dans les années 1980.
Une consultation en Kanaky doit avoir lieu en 2018. Les colonialistes essayent de limiter l’accès des Kanaks (59 % des électeurs potentiels) à un scrutin dans lequel population colonisée et population colonisatrice auraient le même droit de vote...
Quel est l’intérêt pour l’État français de maintenir ces colonies ?
Plus de 6 000 militaires sont disposées dans 5 zones stratégiques : Mayotte, Réunion, Kanaky, Polynésie et Antilles. La France a un territoire de souveraineté maritime de 11 millions de km2, en faisant le deuxième espace maritime derrière celui des USA. Cela induit un contrôle militaire, notamment sur le détroit de Mozambique, et des ressources potentielles de pêche et d’extraction minière. Au-delà de ressources minières et agricoles exploitées par les descendants des colons, ces îles ont un indéniable intérêt stratégique.
La structure coloniale existe-t-elle toujours ?
Dans ces « départements français », les revenus médians révèlent la pauvreté de la population : 880 euros à la Réunion, 1 100 euros à la Martinique... Et dans tous ces territoires, le chômage est de 36 % en moyenne, plus de 50 % pour les jeunes ! Le coût de la vie est par contre de 12 à 17 % plus élevé qu’en « métropole », parfois plus de 30 % sur des produits de première nécessité.
Les richesses, les terres, les mines, les conseils d’administration des grandes entreprises présentes (notamment dans le tourisme et le bâtiment) sont essentiellement des possessions des descendants des colons. Ainsi à la Martinique, ils possèdent les 2/3 des terres cultivables, la quasi-totalité des usines à sucre, les 9/10 des plantations de bananes, la totalité des conserveries d’ananas et le quasi-monopole du commerce d’import-export. Les coloniséEs, eux, sont ouvriers, précaires ou chômeurs.
Aux Antilles, les mouvements indépendantistes revendiquent une redistribution des terres qui permettrait de revenir sur l’accaparement des terres par les colons. En Polynésie, les populations exigent la réparation des désastres humains et écologiques produits par les explosions nucléaires.
Le système économique fonctionne pour le profit des compagnies et entreprises de la métropole, appuyés par la présence des colons. Les populations autochtones ou descendantes d’esclaves sont exploitées économiquement, discriminées. Ségrégation raciale et sociale se confondent. Celles-ci se prolongent dans la situation vécue dans l’hexagone par les populations issues des dernières colonies.
Le monopole de la « métropole » française sur les moyens de communication et les échanges commerciaux, l’isolation maintenue avec les pays limitrophes, ont développé un système liant dépendance financière et non-développement, avec l’utilisation par le colonialisme de toute une couche, essentiellement d’origine française, dépendante des emplois de la fonction publique.
Mais ce carcan n’empêche pas des luttes de résistance. Ainsi, le mouvement du LKP, la grève générale de 2009 aux Antilles, a permis de mettre clairement en avant des exigences populaires.
Quelle position défend le NPA ?
Le NPA a toujours considéré que c’était aux populations de ces dernières colonies de former leurs organisations, leurs exigences face à l’État français. Nous sommes partie prenante des actions de solidarité avec les mouvements anticolonialistes. Pour notre part, nous défendons évidemment le droit à l’autodétermination des populations colonisées et soutenons la revendication d’indépendance de ces territoires. Nous exigeons le retrait de toutes les troupes et installations militaires françaises.
La nature des liens à établir entre ces territoires devenus souverains et les autres pays à l’échelle internationale doit être du seul ressort des populations locales. Nous considérons évidemment que la libération des liens coloniaux doit aller de pair avec la libération sociale. Car trop d’exemples existent d’États libérés du joug colonial pour retomber ensuite dans un nouveau, celui du néocolonialisme dans le cadre de la mondialisation capitaliste...