Plus de cent ans après l’armistice de 1918, Macron veut prolonger l’exaltation des aventures impérialistes. Il a inauguré, le lundi 11 novembre à Paris, un monument aux morts pour la France en « opérations extérieures » (OPEX dans le langage militaire), saluant le sacrifice d’une nouvelle « cohorte héroïque » de l’histoire nationale. Le projet d’un tel monument était né en 2011 sous Sarkozy, a été poursuivi par Hollande et se concrétise sous Macron, belle continuité d’une 5e République née d’un coup d’État militaire à Alger, une époque où pour « nos » dirigeants, « l’Algérie, c’est la France ».
Non content de célébrer les morts (nous ne portons aucun jugement sur ces destins tragiques : aujourd’hui les motifs d’un engagement dans l’armée peuvent renvoyer à des motifs divers et, notamment, à la galère de petits boulots ou du chômage), Macron n’a pu se retenir de glorifier son propre rôle : « Je sais les conséquences opérationnelles, humaines, familiales, des décisions d’intervention et des ordres d’engagement que je suis amené à prendre pour le bien de la nation […]. Le chef de l’État vit avec cette part de tragique que renferme en puissance chacune de ses décisions ».
Dans le régime tel qu’il fonctionne, c’est en effet le président qui décide dans la plupart des cas d’envoyer des militaires à travers le monde. Le Parlement est au mieux informé et débat sans vote : situation exorbitante même par rapport aux principes de la démocratie bourgeoise.
Ces soldats sont-ils « morts pour la France » ? Ils sont morts en obéissant aux ordres des gouvernements français ; mais obéissant à ces ordres, qui servaient-ils ? Ce qu’on appelle « territoires extérieurs » appartiennent à d’autres pays : ce sont des territoires étrangers ! La question qu’il faut poser est : pourquoi les gouvernements français maintiennent-ils des troupes françaises à l’étranger ? Pour mener quelles politiques, pour protéger quels intérêts ?
« Celui qui meurt pour la France ne meurt pas en vain », a aussi déclaré Macron. « On croit mourir pour la patrie ; on meurt pour des industriels » écrivait par contre à juste titre Anatole France (prix Nobel de littérature en 1921) dans l’Humanité du 18 juillet 1922, après la grande boucherie de la Première Guerre mondiale.
Henri Wilno