Un citoyen modèle. Jean-Paul Delevoye affiche un bien beau cursus : maire, parlementaire, ministre de la Fonction publique sous Chirac, médiateur de la République, président du Conseil économique, social et environnemental. Au niveau politique, une parfaite trajectoire de droite, débutée au RPR, prolongée à l’UMP et achevée à La République en marche ! Logiquement nommé par Macron haut-commissaire aux Retraites dans le gouvernement actuel, il est aujourd’hui ce besogneux rapporteur qui fait mine de dialoguer avec les « partenaires sociaux » et tente de vendre sur le fond une contre-réforme totalement antisociale.
Aussi dimanche, les révélations du journal le Parisien ont fait un peu tache : dans sa déclaration auprès de la Haute autorité pour la transparence de la vie politique, Delevoye a « oublié » de déclarer sa fonction d’administrateur au sein de l’Institut de formation de la profession de l’assurance. Cet Ifpass est l’organisme de référence de la branche, étroitement lié à la Fédération française de l’assurance, car tous les assureurs y forment leurs salariéEs actuels et futurs. Pour Delevoye, il s’agit certes d’une fonction non rémunérée, mais qui éclaire parfaitement le fond du projet macroniste actuel : attaquer les retraites par répartition et toutes les solidarités afin que les grandes compagnies d’assurance, pourvoyeuses de retraites complémentaires coûteuses, mettent enfin la main sur le pactole de la protection sociale.
Ce conflit d’intérêts, cette confusion des genres pas si confuse entre missions publiques et intérêts privés, n’est pas sans rappeler la pratique bien connue du « pantouflage », cet aller-retour que bien des hauts fonctionnaires effectuent entre le secteur public et des entreprises privées auprès desquelles ils apportent leur expertise, leur savoir-faire, leurs relations et leur carnet d’adresses...
Devant le tollé suscité par les révélations du Parisien, Delevoye a dû bien vite annoncer sa démission d’administrateur de l’Ifpass. Pourtant, le compte n’y est pas : c’est bien de son haut-commissariat aux Retraites qu’il doit dégager, en emportant avec lui cette contre-réforme dont le monde du travail ne veut pas.
Manu Bichindaritz