Publié le Mercredi 18 mai 2022 à 09h21.

Face au néolibéralisme autoritaire, faire entendre notre camp social

Même quand on ne s’attend à rien, on peut parfois être quand même déçu : tout ce battage autour de la « future Première ministre du nouveau gouvernement Macron » pour finalement nous annoncer l’ancienne ministre du Travail. Après avoir essuyé de nombreux refus, le président a donc fini par demander à Élisabeth Borne qui, en fidèle soldate de la macronie, a accepté la « mission » qui lui a été confiée. Et quelle mission…

 

CertainEs d’entre vous seront probablement aussi surpris qu’heureux d’apprendre que, cette fois, la charge de Première ministre a été confié à une « femme de gauche ». Technocrate de renom, Élisabeth Borne fait partie des rares transfuges du gouvernement Hollande (au cabinet de Ségolène Royal) qui ont fait sans encombre le passage au gouvernement Macron. La preuve de son engagement à gauche ? Elle est au micro-parti des anciens sociaux-libéraux passéEs au libéralisme décomplexé fondé par Jean-Yves Le Drian, « Territoires d’avenir »...

L’incarnation de la politique antisociale de Macron

Mais en réalité Élisabeth Borne incarne surtout la continuité avec le premier quinquennat. Elle en est clairement la « bonne élève », en plus de cocher la case « femme » que Macron a fini par s’imposer notamment devant l’échec de son bilan sur la question des violences faites aux femmes, prétendument « grande cause du quinquennat » puis du suivant (ou sinon du suivant). Elle est passée avec loyauté au Travail, aux Transports, à l’Environnement... Trois fois ministre mais aussi ancienne présidente de la RATP. Elle y a d’ailleurs hérité du surnom « Borne out », baptisée ainsi par les salariéEs, en raison de sa politique et de sa gestion des « ressources humaines ».

Pourtant, quand on écoute les experts et politologues dans les médias on pourrait croire que l’on est face à un chantre du fameux « dialogue social » ! « Madame Borne sait parler aux syndicats », a-t-on ainsi pu entendre. Les syndicalistes et les militanteE se souviennent bien de son passage… mais pas pour ses qualités sociales ! Tout un programme, donc.

Le programme de Macron : attaques antisociales et autoritarisme

Élisabeth Borne est une de ceux qui ont mené et incarné le combat contre le système de retraite et contre les mouvements sociaux de ces cinq dernières années. Mais elle est également emblématique de la privatisation des services publics, à la RATP mais aussi à la SNCF, et de la réforme de l’assurance chômage. Selon ses alliés, elle est celle qui a « plié » la réforme de la SNCF contre les cheminotEs et leurs droits. Elle est la partisane la plus fervente de la suppression des régimes dits « spéciaux ». Enfin, elle est celle qui n’a cessé de réaffirmer ces dernières semaines la nécessité de « ­réformer » les retraites...

Les expertEs ne manquent pas de noter que Borne n’est pas une « personnalité politique de premier plan ». Loyale, acquise à la politique du président « tout-puissant » et discrète, elle est aussi l’incarnation du désir de Macron de tout régir et de rester le chef du gouvernement à la place du Premier ministre. L’intendance suivra, et le président estime que Borne a été une bonne intendante jusque-là…

Préparer les batailles à venir

J-L Mélenchon s’est empressé de se définir comme le « premier opposant » de ce futur gouvernement, en ne nous épargnant pas les dispensables blagues sur le court mandat à venir de sa « prédécesseuse ». Cela ne constitue évidemment pas une réponse à la hauteur des batailles à venir pour notre camp social...

Pour nous, la situation reste la même. La promesse d’un quinquennat brutal, dicté par l’ultra-libéralisme et l’autoritarisme, face auxquels il paraît important d’affirmer qu’il faudra continuer à s’opposer par tous les moyens. Et qu’il faudra construire un mouvement pour les retraites mais plus large et profond, qui aille (au moins) jusqu’au bout contre la réforme et dans l’affirmation d’un autre projet de société face au travail...

Il y a urgence à construire les cadres qui nous permettront de nous opposer au gouvernement Macron-Borne, dans nos syndicats, sur les lieux de travail, de vie, d’études, pour se préparer à cet affrontement sur les retraites – mais qui est loin d’être le seul... Dans le public comme dans le privé !

L’étape des législatives

Vu l’état du rapport de forces au sortir de la présidentielle, il est également important de donner confiance dans la possibilité d’imposer par nos luttes un autre projet de société. Les élections législatives ne sont qu’une étape, mais elles sont essentielles pour Macron dans l’affirmation de sa politique libérale, réactionnaire et antisociale. Une victoire écrasante aux législatives ne fera qu’aller dans le sens de cette politique affirmée dans le choix de Borne lundi soir. Sans même parler de la nécessité que nous avons plus que jamais à faire reculer les idées et politiques racistes, sexistes et LGBTIphobes, venues de l’extrême droite (la présidentielle nous l’a rappelé) mais qui continuent d’imprégner l’ensemble du champ politique jusqu’à une large partie de la gauche réformiste...

Il y a donc un enjeu dans le succès et la victoire des campagnes populaires, des candidatures claires sur cette urgence sociale et politique ! Des candidatures de rupture, issues du monde du travail et des quartiers populaires, représentant une gauche de combat, en rupture avec le social-libéralisme. Bref des candidatures qui servent à faire entendre notre camp social, et donner confiance à ce dernier dans sa capacité à s’opposer aux politiques des capitalistes. Des candidatures qui peuvent se trouver parmi celles présentées par la NUPES, tandis que dans d’autres circonscriptions nous mènerons campagne pour des candidatures issues du NPA et de cadres unitaires regroupant des anticapitalistes, des militantEs du mouvement social, féministe, antiraciste, associatif, déterminés à faire face à Macron et à l’extrême droite toute en refusant les compromis avec le social-libéralisme.