Publié le Jeudi 22 mai 2025 à 11h00.

Kanaky – Nouvelle-Calédonie : L’extrême droite et l’extrême centre en embuscade

Nicolas Metzdof, député membre du groupe macroniste, et Sonia Backés, ancienne secrétaire d’État à la citoyenneté de Darmanin et porte-parole de la droite coloniale, ont mis en échec Manuel Valls dans sa tentative d’arriver à un accord entre les forces politiques locales.

Ils ont rejeté le projet de souveraineté partagée proposé par l’État car, disent-ils, il conduirait le pays à l’indépendance. Ils ont présenté un contre-projet conduisant à une partition du pays sur des bases ethniques. « L’eau et l’huile ne se mélangent pas », déclare Backés. Ils ont revendiqué le soutien du trio Macron, Darmanin, Lecornu, responsables de l’explosion du pays en 2024.

Les projets impérialistes de Macron

Durant son premier mandat, Macron s’est comporté en empereur bienveillant, promettant aux Calédoniens une place de choix dans une grande alliance indo-pacifique qu’il se faisait fort de construire. Pour cela il veut renforcer les liens avec la France, réorienter la production de nickel vers les besoins de l’industrie européenne. Ce projet est à l’opposé du projet porté par le peuple kanak et le FLNKS, d’une Kanaky ancrée dans son environnement, le Pacifique et l’Asie. 

Au nom des intérêts supérieurs de l’impérialisme français, Macron rompt avec la politique mise en œuvre par l’État français depuis les accords de Matignon en 1988 et de Nouméa en 1998. N’ayant pu convaincre les indépendantistes de s’engager dans ses projets impérialistes, ils deviennent un obstacle à leurs réalisations. Il n’en est pas de même de la droite coloniale locale fragilisée par la mobilisation croissante dans les élections, les institutions et dans la rue. Une alliance politique est passée entre le trio Macron, Darmanin, Lecornu et l’extrême droite ­suprémaciste calédonienne.

Alliance de la macronie et des suprémacistes Backés et Metzdof

Alors qu’elle avait refusé de s’engager pour Macron au deuxième tour de la présidentielle en 2022, Backés est nommée secrétaire d’État auprès de Darmanin, ministre de l’Intérieur et de l’Outre-mer, en charge de la Nouvelle Calédonie. Premier couac, elle nomme un proche revendiqué de Zemmour dans son cabinet. Deux ans plus tard, Metzdof – alors que Nouméa brûle, que Gaza est sous les bombes – rencontre l’ambassadeur d’Israël à Paris pour lui exprimer son soutien dans leurs combats communs contre le terrorisme et la barbarie... Pour tenter d’isoler le FLNKS sur le plan diplomatique, Macron entreprend une tournée dans les petits États du Pacifique, distribuant chèques et projets de coopération.

En mai 2024, le projet macronien s’est heurté à un mur, celui de la mobilisation du peuple kanak et sa volonté de construire un pays souverain avec l’ensemble des habitantEs qui le souhaitent. En Kanaky, il devient clair que rien ne pourra se faire sans accord avec le peuple kanak et ses représentants. La solidarité spontanée des peuples du Pacifique, et des peuples en lutte dans le monde, contraint les gouvernements à adopter une attitude plus ferme en défense des droits du peuple kanak.

Le projet de Valls mis en cause par les suprémacistes calédoniens

Remis à sa place par l’Australie lors de l’affaire de la rupture unilatérale du contrat d’achat de sous-marins à la France, Macron se trouve dans une double impasse : en Kanaky et dans la région. Valls est nommé ministre des Outre-mer. Il revendique une continuité politique avec les équipes de Rocard et de Jospin qui ont négocié et mis en œuvre les accords de Matignon et Nouméa.

Le FLNKS et l’UNI, les deux délégations indépendantistes, ont déclaré que le projet présenté par l’État pouvait servir de base pour poursuivre les discussions. Il en est de même pour Calédonie Ensemble (droite modérée) et l’Éveil océanien (représentant la communauté wallisienne).

La politique du pire

Aujourd’hui, l’extrême droite calédonienne a rompu les discussions et s’apprête à jouer la politique du pire, se sachant minoritaire dans le pays. En France, ils font le tour des droites et des extrêmes droites en recherche de soutien à leur projet d’apartheid. Déjà Wauquiez a demandé la peau de Valls. À Nouméa les provocations se multiplient contre les Kanak : tracts racistes, menaces des milices, ségrégation renforcée, privation de l’accès aux aides sociales, aux logements alors que le pays traverse une terrible crise économique et sociale. Mettre le feu pour faire échouer le projet de Valls qu’ils assimilent à un projet d’abandon de Nouvelle-Calédonie par la France, tel est le chemin que semblent vouloir emprunter les suprématistes calédoniens. Avec le soutien de Macron-Darmanin-Lecornu ?

Jeff Castel