Le principal danger des structures du type « Bastion social » est sécuritaire. Presque à chaque fois, les villes qui ont vu éclore des « bastions sociaux » ont subi des violences d’extrême droite, véritables signaux avant-coureurs. Et la présence d’un local ne réduit pas la tension, au contraire.
Lyon. La liste est longue depuis une vingtaine d’année des agressions physiques et des attaques. Fin 2012, on a vu une recrudescence des agressions racistes et attaques ciblées de militantEs de gauche. La dernière en date est la dégradation, en mars 2018, du local de la CNT 69, après celui de la CGA (coordination des groupes anarchistes), du PCF du 1er arrondissement (dégradé cinq fois en cinq ans), de Radio Canut et de la Maison des passages, avant une conférence publique contre le racisme et les violences policières. En avril 2017, un journaliste de Rue 89, qui traite de la transformation du Vieux Lyon en « Facho-land », découvre à l’entrée de son immeuble un graffiti « on sait où te trouver, Laurent », signé d’une croix celtique.
Nantes. Deux jours après Angers (cf. « Tension sur les facs »), les amis de F.-A. Gannat, avec trois autres comparses, passent à tabac deux jeunes, coupables d’avoir arraché une affiche du GUD, en marge de la manifestation spontanée le soir de l’élection présidentielle. Une étudiante du GUD téléphonera à l’une des victimes, encore hospitalisée, pour l’intimider et modifier son témoignage. Les mêmes avaient déjà attaqué en février un adolescent originaire du Bangladesh. Le Bastion social n’a pas encore ouvert de succursale à Nantes. Les déboires judiciaires du GUD pourraient l’expliquer. Pour autant, la présence violente de l’extrême droite ne faiblit pas. En décembre 2017, une bande cagoulée gaze et matraque des militants sur un lieu occupé de l’université, en soutien aux jeunes exilés isolés. L’attaque est revendiquée par un « front anti-collabo » qui affirme « qu’aucune personne qui se livre à l’organisation ou la promotion de l’immigration ne sera plus en sécurité ».
Chambéry. Voir notre article.
Il est significatif que tous ces locaux comportent souvent une salle de boxe, parfois une bibliothèque mais toujours un bar. Si ces vaillants « jeunes rebelles blancs » s’entraînent aux sports de combat, ils sont loin d’être tous « straight-edge ». Les soirées ou les concerts, bien arrosés, finissent souvent en bris de vitre ou en coups de poing... L’alcool ne rend pas plus intelligent, qu’on s’appelle J.-V. Placé, Davy Rodriguez ou F.-A. Gannat.
Les connexions avec certains groupes ultras du football favorisent les pratiques violentes. Encore récemment, en mars 2018, des affrontements entre hools lyonnais et policiers (qui comptent treize blessés) impliquent l’extrême droite lyonnaise : les perquisitions permettent d’ailleurs de découvrir deux armes à feu non déclarées... Des cas similaires existent à Paris, Lille ou Strasbourg. Les modes relèvent aujourd’hui plus du monde des tribunes que du folklore skin-head nazi, qui reste pourtant ancré dans l’imaginaire collectif. Leur violence, parfois plus psychiatrique que politique, s’exerce aussi entre eux : le fondateur du premier Pavillon noir, longtemps chef du GUD, Logan Djian a été filmé en 2015 frappant et insultant chez lui son « Kamarad » gudard Édouard Klein.