Florian Philippot a-t-il vraiment divorcé avec le FN, le regrette-t-il, s’en éloigne-t-il ? Ou pourrait-il un jour en être, au moins, un allié ? La question occupe les médias, où le désormais ex-idéologue du FN entre 2011 et 2017 reste un invité très fréquent.
Aujourd’hui, l’homme âgé de 36 ans se trouve à la tête d’un petit parti, appelé « Les Patriotes », initialement fondé en tant qu’association au mois de mai 2017. Une structure dont ses détracteurs à l’intérieur du FN considéraient alors qu’elle constituait « un parti au sein du parti », et dont la création a largement contribué à la marginalisation de Philippot au sein du parti.
Grandes et petites manœuvres
Les Patriotes constituent pour l’instant plutôt un groupuscule qu’un parti de masse. À la fin septembre 2017, peu après son départ du FN, Philippot revendiquait officiellement 2 500 adhérents ; aujourd’hui, il en évoque 4 000, ou parfois un peu plus. Du côté du FN, on les chiffre plutôt à « 400 ». Certes, la guerre des chiffres fait partie de la propagande. Toujours est-il qu’il paraît plausible que le nombre d’adhérents, ou en tout cas de militants actifs, de la nouvelle structure soit plutôt à trois qu’à quatre chiffres. Philippot cherche encore à construire sa formation, entamant, le samedi 4 novembre à Draguignan, une « tournée des initiatives locales ».
Au sein du FN, Philippot, ancien conseiller spécial et – selon certains jaloux – quasiment exclusif de Marine Le Pen (avant qu’elle ne le lâche progressivement courant 2016 et plus encore en 2017), a d’ores et déjà été remplacé. Son rôle auprès de la présidente du parti, notamment de plume pour ses discours, a été en partie repris par Philippe Olivier. Ce dernier est à la fois un beau-frère de Marine Le Pen, marié à sœur aînée Marie-Caroline, et un ancien lieutenant de la scission sous Bruno Mégret (à partir de fin 1998) avant son retour au bercail. Face à l’opinion publique, le rôle de « tête présentable aux médias » a été en partie repris par Sébastian Chenu, transfuge de l’UMP (à l’époque) au FN, autrefois fondateur de « GayLib » (une association d’homosexuels qui défendait Nicolas Sarkozy).
Souverainisme vs identité nationale ?
Alors que Chenu ressemble plus à un opportuniste en politique, Olivier est un idéologue. À la différence de Philippot, il est l’adepte d’une ligne que ce dernier qualifie dans ses interviews de « discours identitaire, civilisationnel ». Comprendre : surtout, et de façon primaire, anti-immigréEs et anti-musulmanEs. Un créneau que Philippot lui-même ne renie pas, puisqu’il ne cesse de dire que « ces sujets ont leur importance » et qu’il « faut en parler ». Mais il faut – selon lui – les compléter, dans une démarche qu’il qualifie d’« ouverte et moderne », par un discours sur d’autres sujets : « école, environnement, petits salaires ». Philippot, sur le fond, n’est aucunement plus modéré, mais cherche à apparaître comme porteur d’un discours plus englobant. Le fondateur des Patriotes cherche, par ailleurs, à apparaître comme un opposant public et déterminé à la « réforme » du droit du travail.
Pour le moment, la prétention de Philippot de vider de sa substance militante le FN – un parti qui, selon lui, aurait « abandonné la souveraineté nationale » – ne se réalise pas : son mouvement apparaît actuellement bien trop groupusculaire et trop élitiste, trop intellectuel. En revanche, son départ aura permis à la direction du FN de lâcher du lest sur la question de la sortie de l’euro, thème sur lequel elle subissait des pressions extrêmement fortes. Marine Le Pen a ainsi affirmé, le 1er octobre à Poitiers, qu’il s’agissait désormais de « réformer de l’intérieur » l’Union européenne. Florian Philippot fustige, depuis, un « euro-réformisme » auquel se serait converti son ancien parti. Mais cela risque de jurer avec sa volonté d’apparaître « ouvert et moderne »…
Commission nationale antifasciste