Quatre mois et demi après ce qu’un ministre osa appeler « un coup de génie », Hollande doit déclarer forfait et retirer son projet de réforme. Un énième échec pour le président le plus désavoué de la 5e République. Retour sur cette fin de partie.
En reprenant à son compte une partie du programme de la droite, en jouant un coup tactique pour piéger celle-ci, Hollande n’a réussi qu’ à déstabiliser et mécontenter un peu plus son propre camp. Ce devait être le beau spectacle d’union de la représentation nationale, ce fut un spectacle minable, donné par les élus de la nation, loin des préoccupations réelles de leurs concitoyens. Car s’ils acceptaient de réformer la Constitution, ils n’ avaient le choix qu’entre deux options, aussi mauvaises l’une que l’autre : soit créer l’apatridie en étendant la déchéance de nationalité à tous les mononationaux, soit affirmer l’inégalité de traitement entre tous les Français en inscrivant dans la Constitution la déchéance pour les seuls binationaux. L’Assemblée nationale à majorité socialiste a voté l’une, le Sénat à majorité de droite a voté l’autre. Exit donc le projet présidentiel de modification constitutionnelle !
Nous avons été nombreux à nous opposer dans la rue à ce projet, à dénoncer les stigmatisations renforcées que la réforme ferait subir aux binationaux ainsi que les menaces qui pèseraient lourdement sur nos libertés et nos droits, par les interdictions de manifester, les assignations à résidence, les perquisitions. Se battre contre la Constitution elle-même est toujours plus difficile, et ces ajouts visaient bien sûr à miner nos résistances. Ils ouvraient la porte à de nombreux abus qui bien qu’illégitimes seraient difficilement attaquables, une fois revêtus de la légalité constitutionnelle. Le retrait du projet est donc pour nous une victoire.
Vigilance et résistance
Les outils du pouvoir, même sans être constitutionnalisés, existent et ont une forte capacité de nuisance par la division et la répression qu’ils permettent de notre camp social : la déchéance de nationalité pour les binationaux est toujours possible puisqu’elle est inscrite dans le code civil, et l’état d’urgence est en application jusqu’à fin mai. Un nouvel arsenal législatif dit anti-terroriste est aujourd’hui en œuvre de façon pérenne. Et ce n’est sans doute pas fini.
Vigilance sur leurs projets, et résistances ! Nous exigeons la fin de l’état d’urgence. Nous vivons chaque jour concrètement la violence d’État : multiplication du nombre des manifestantEs blessés, augmentation des arrestations et gardes à vue, durcissement des sanctions pénales dans le cadre de notre combat contre leur loi travail.
Les résistances s’organisent sous des formes variées : manifestations, blocages, occupations de places, manifestations devant les commissariats, Nuits Debout... Toutes affirment que nous ne plierons jamais devant la répression violente et que nous continuerons à nous opposer de toutes les manières que nous choisirons à ce gouvernement prétendument socialiste qui veut réaliser plus que jamais les vœux du Medef.
Roseline Vachetta