Publié le Mercredi 30 novembre 2022 à 08h00.

« Réforme » de l’assurance chômage : faire face à la démolition sociale

La contre-réforme de l’assurance chômage devrait entrer en vigueur à partir du 1er février 2023. Il s’agit d’une nouvelle attaque contre nos droits sociaux, menée par un gouvernement déterminé à imposer toujours davantage de « recettes » ultralibérales.

La principale mesure de la réforme de l’assurance chômage du gouvernement Macron consiste à réduire de 25 % la durée des droits d’allocation tant que le taux de chômage restera inférieur à 9 %. Actuellement officiellement à 7,3 %, ce taux de chômage n’avait pas été atteint depuis 2017.

Un nouvel angle d’attaque

À partir du 1er février 2023, via l’application d’un coefficient réducteur de 0,75, les durées maximales d’indemnisation passeront donc à 18, 22,5 et 27 mois1. Le gouvernement envisage même d’appliquer un coefficient de 0,6 en cas de chômage à 5 % qui reviendrait à abaisser à 14 mois la durée ­d’indemnisation maximum.

Cette mesure poursuit et aggrave le décret d’octobre 2021 qui avait modifié le calcul de l’allocation. Après la baisse du montant de l’indemnisation, c’est donc la baisse de sa durée. À l’époque le gouvernement avait bien sûr expliqué que même si le montant journalier baissait, le montant global resterait identique. Résultat : quand le chômage est élevé, on baisse les droits car le régime est déficitaire, quand la situation est au « vert », on baisse les droits aussi.

Restrictions d’accès aux allocations

Il s’agit en outre de refuser l’accès aux allocations en cas d’abandon de poste et de refus de CDI après CDD et intérim. Cette mesure s’inscrit dans un dispositif global visant à contraindre les travailleurEs privés d’emploi à accepter un emploi mal payé et aux conditions de travail dégradées. Ceci accompagne l’augmentation des objectifs de contrôle de la recherche d’emploi, la mise en place de l’expérimentation qui, pour les allocataires du RSA, conditionne le versement du RSA à 15/20 h d’activité, la création de « viviers » regroupant des chômeurEs inscrits dans les métiers « en tension » (santé, action sociale, transport, restauration). Et pour mettre en œuvre cette politique, la création de France Travail (le nom est en soi tout un programme…) dès 2024. 

Un enjeu essentiel du capitalisme

Pour maintenir son niveau de profits, le capitalisme a besoin d’augmenter les contraintes sur les travailleurEs. Le gouvernement s’en donne les moyens et veut en finir avec la gestion du régime d’assurance chômage par les « partenaires sociaux ». Traditionnellement, ceux-ci décidaient des critères d’indemnisation et la convention était en général agrée par le gouvernement. La loi de juillet 2019, pour « la liberté de choisir son avenir professionnel », a marqué une rupture avec une lettre de cadrage imposant des économies sur le dos de chômeurEs et, de fait, une reprise en main des modalités d’indemnisation. Le financement avait déjà été impacté par la suppression de la part dite salariale des cotisations d’assurance chômage et son transfert à la CSG. L’objectif affiché est d’inscrire la gestion du régime dans la loi de financement de la Sécurité sociale sous la contrainte des objectifs de réduction des déficits et autres priorités budgétaires facilitant les prédations de la bourgeoisie.

Le capitalisme met les travailleurEs au chômage et refuse de les indemniser

La logique du profit en économie capitaliste crée le chômage, l’armée de réserve, et « en même temps » refuse de mettre en place les conditions permettant l’indemnisation des chômeurEs. Historiquement celle-ci a été d’abord assurée par les caisses de résistance syndicales. Aujourd’hui la multiplication des conditions d’accès et les politiques menées par les différents gouvernements font que ce sont moins de 40 % des chômeurEs qui sont indemnisés. Et le montant moyen est de 982 euros net. On est loin du système parmi les plus « généreux » décrit par Macron. Loin de permettre le « plein emploi », l’objectif réel est à la fois de mettre de force les chômeurEs au travail et de mettre la main sur les 38 milliards d’euros d’allocations versés chaque année.

Reprendre le chemin de la mobilisation

La défense des conditions d’indemnisation des privéEs d’emploi concerne l’ensemble des travailleurEs à l’heure où la proportion de travailleurEs inscrit à Pôle emploi et alternant période de chômage et travail ne cesse d’augmenter (52 % à ce jour). Face à cette attaque, c’est peu de dire que la mobilisation n’est pas la hauteur !

Les directions syndicales se sont contentées d’exprimer leur désaccord tout en acceptant de participer aux réunions de « concertation ». Et les associations de chômeurEs ne sont pas pour l’essentiel en capacité de réagir. À tel point que cette année il n’y aura pas de manifestation début décembre quand, l’année dernière, la manifestation parisienne avait rassemblé 200 personnes.

En 2020, face à l’atonie des directions syndicales contre la réforme modifiant les conditions nécessaires à l’ouverture de droit et au changement du mode de calcul, une assemblée générale impulsée par la CGT spectacle avait permis de mobiliser largement et de créer des liens avec des équipes syndicales et des collectifs de précaires. C’est le moment de réactiver ces cadres de mobilisation !

  • 1. 18 mois comme durée « standard », 22,5 mois pour les chômeurEs âgés de 53 à 55 ans, 27 mois pour les plus de 55 ans.