Hollande veut accélérer la réforme territoriale pour en finir avec « les enchevêtrements, les doublons, les confusions », en fait accentuer une politique qui sous couvert de décentralisation plie les collectivités locales aux politiques d’austérité... tout en concentrant les pouvoirs. L’occasion aussi pour lui de tenter de reprendre la main face aux différents partis, dont sa majorité, qu’il a reçus à l’Élysée.
C’est l’austérité à tous les échelons. La feuille de route fixée par le gouvernement aux communes, intercommunalités, départements et régions est simple : économiser 11 milliards d’euros de 2015 à 2017. La méthode est tout aussi simple : prendre ces 11 milliards dans les 55 milliards de dotations que l’État leur verse chaque année. C’est dans ce cadre que s’inscrit la réforme territoriale qui veut réduire de moitié le nombre de régions, supprimer les conseils généraux à l’horizon 2021, voire supprimer les départements. Que le gouvernement y parvienne ou non, c’est bien l’austérité qu’il compte accentuer, de façon à faire payer, par tous les canaux possibles et imaginables, les 50 milliards d’euros qu’il destine au patronat. La pression sur les élus est extrêmement forte alors que la dette des collectivités locales ne cesse de grossir, passant de 104 milliards d’euros en 2002 à 173,7 milliards en 2012. Une hausse de 67 % en dix ans.
Unanimité cacophonique…Tous les partis institutionnels partagent les objectifs de Hollande, mais tous craignent d’affronter l’hostilité de leurs éluEs. La majorité, qui détient actuellement 21 des 22 régions de « France métropolitaine » et à peu près la moitié des départements, est coincé entre le soutien à l’exécutif et la grogne d’une partie de ses troupes. EÉLV, qui ont bien moins d’éluEs, sont moins regardants et soutiennent sans réserve. Comme le Modem, l’UDI est plutôt favorable, à conditions d’avoir la monnaie de leur soutien. Copé, lui, veut fusionner conseils régionaux et généraux mais, « en revanche, onze super-régions, ce n’est pas le système de l’histoire de France, on n’a pas le droit de le faire sans changer la Constitution et sans demander aux Français leur avis. » Dans le même sens, Marine Le Pen dénonce une « landerisation de la France », inspirée selon elle par un « modèle allemand imposé par l’Union européenne », et s’oppose à ce « bouleversement total de la France historique »... Toute préoccupation démocratique est totalement absente de ces tripatouillages administratifs et politiciens. D’ailleurs le pouvoir des préfets n’est lui nullement remis en cause. Il s’agit de concentrer les pouvoirs des collectivités locales par ailleurs étranglées par les banques. La clause de compétence générale, qui permet à une collectivité d’intervenir dans tous les domaines d’intérêt local qu’elle juge nécessaires, va être supprimée. Alors révision constitutionnelle, référendum ou démarche parlementaire, quoi que Hollande décide, il ne fera que renforcer le pouvoir de l’État et... des banques. Avec en prime une petite manœuvre qui lui permet de gagner du temps, le report des élections régionales en 2016... Par contre, il n’est venu à l’idée ni de Hollande ni d’aucun parti de demander la proportionnelle intégrale à tous les niveaux de représentation !
Yvan Lemaitre