Publié le Lundi 9 septembre 2019 à 15h47.

Regrouper les mécontentements

Malgré une communication de rentrée, laissant croire que Macron et son gouvernement ont changé, malgré une fausse reculade sur le problème des retraites, cette rentrée voit le mécontentement enfler de partout : profs, urgentistes en colère. La réforme brutale des retraites est en marche, visant à léser des millions de gens. Le problème qui se pose à nous est d’unifier nos colères. 

Haro sur les chômeurs

Car la réalité est bien là : un chômage toujours au plus haut, malgré les rodomontades du gouvernement, qui, à défaut de le faire baisser, s’ingénie à diminuer le nombre de chômeurs en les radiant en masse (45 000 personnes rien qu’un juillet dernier, d’après Pôle Emploi, soit une hausse des radiations de 12,8% par rapport au trimestre précédent). La réforme contre les chômeurs, votée cet été, aura comme conséquence de diminuer, voire de supprimer leurs indemnisations, et de leur faire accepter n’importe quel emploi, toujours plus mal payé. A noter que des « emplois » de livreurs déposés par Deliveroo et Uber Eats, se retrouvent sur le site de Pôle Emploi !  

Les dividendes explosent

Dans le même temps, la France conserve son statut européen de pays qui verse le plus de dividendes à ses actionnaires, 51 milliards de dollars au deuxième trimestre 2019, un niveau historique jamais atteint. Depuis 2009, les 2/3 des bénéfices ont été aux actionnaires. 

Gilets jaunes et mouvements sociaux

Ceci explique sans doute cela. De nombreux salariés, auto-entrepreneurs, artisans, ne s’en sortent plus, d’un côté. Et de l’autre, les services publics partent à la dérive, disparaissent des territoires, faute de moyens, réservés en grande partie aux grosses entreprises, arrosées de milliards d’argent public.

Trop, c’est trop, ont réagi les Gilets jaunes. Cette politique injuste a été ressentie comme insupportable au moment où l’ISF a été supprimé, les aides au logement rabotées, et les taxes sur le gazole augmentées. Un cocktail explosif. Il faut noter que ce mouvement a la particularité d’être né en dehors des structures syndicales et politiques, et pourtant, il a marqué, et comment, ces derniers mois. Un autre mouvement en train de se consolider, est celui de la grève des urgentistes : à travers leur collectif inter-urgences, ils se sont organisés à la base, sans attendre les hypothétiques et parcellaires appels syndicaux et atteignent, à l’heure où nous écrivons, les 225 services en grève dans le pays.

S’organiser à la base

En cette rentrée, les appels syndicaux se sont multipliés, un jour les enseignants, un autre pour la défense des retraites (FO le 21 septembre et la CGT le 24 !), un autre pour le climat, sans parler des samedis où les gilets jaunes reprennent leurs manifestations. À quoi rime cet éparpillement alors que nous sommes tous attaqués de la même façon, et pour les mêmes raisons ? Les soignants, les postiers, les profs, tous les fonctionnaires pâtissent de la politique de transfert massif d’argent des caisses de l’État vers les grandes entreprises et des baisses des impôts sur les riches (ISF). D’un autre côté, les entreprises privées licencient massivement. Rien que dans les banques, HSBC va supprimer 4000 postes, BNP 20% de ses effectifs français, 750 à la Société Générale. Sans parler de l’ex-Whirlpool, Conforama, General Electric (dont l’ancienne directrice générale a reçu la légion d’honneur par Macron en juillet), Ford, Sanofi, et tant d’autres. C’est d’une politique globale d’attaques contre tous les salariés, fonctionnaires ou non, précaires ou non, qu’il s’agit. Et ce n’est certainement pas en répondant au coup par coup, comme nous y incitent les grandes centrales syndicales, que nous pouvons la mettre en échec. C’est en nous organisant à la base, en nous regroupant à l’échelle nationale, que nous pourrons mettre un coup d’arrêt à toutes ces menaces qui planent sur nos vies, notre futur, notre planète. Tout est en effet lié : ce sont les mêmes qui licencient, cassent le code du travail, précarisent à tout va, et détruisent la planète pour leurs seuls profits. Macron se désole de l’Amazonie qui brûle, mais pour nourrir le bétail, des entreprises françaises ont importé 3 millions de tonnes de soja brésilien cette année, ce qui participe de la déforestation en Amazonie. Tout comme l’importation de bois coupé illégalement, par l’un des leaders mondiaux du négoce de bois, un groupe français, d’après l’ONG Amazon Watch.

Devant l’urgence, il n’est plus temps de demander gentiment aux organisations ouvrières d’organiser la riposte. Si elles devaient le faire sérieusement, elles l’auraient déjà organisé, ou du moins, essayé de le faire. C’est pourquoi il faut s’appuyer sur les exemples existants des Gilets jaunes, du collectif inter-urgences, et de bien d’autres initiatives de ce type, pour organiser et contrôler notre riposte.

Régine Vinon