Quatre ans après la spectaculaire et médiatique interpellation du « groupe de Tarnac », l’accusation prend l’eau de toute part depuis quelques jours. La vérité serait-elle en train d’éclater sur une manipulation d’État ?Petit retour en arrière. Dans l’ambiance assez oppressante d’un sarkozysme débridé, le ministère de l’Intérieur dirigé alors par Michèle Alliot-Marie faisait feu de tout bois, ciblant en particulier les militantEs de la mouvance qualifiée d’« ultragauche ». Désireux de faire un exemple, l’État se livre à un joli coup de filet en mettant en examen une dizaine de militantEs pour « participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un acte de terrorisme ». Il est en particulier reproché à deux d’entre eux, Julien Coupat et Yldune Lévy, d’avoir saboté à Dhuisy en Seine-et-Marne une caténaire de train dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008.
Qui sont les terroristes ?Une justice expéditive, des coupables « terroristes de la mouvance anarcho autonome » –dixit la première flic de France de l’époque– qui font vite les choux gras de la presse, et pourtant… Après des années de lutte de la défense et des accuséEs eux-mêmes, une autre vérité émerge. À commencer par le rôle plutôt trouble d’un agent anglais infiltré, dont les témoignages –aujourd’hui contestés– ont été à l’origine du rouleau compresseur policier et judiciaire. Et les incohérences se multiplient, mettant la justice dans un grand embarras. La carte de crédit d’Yldune Lévy utilisée par celle-ci à Pigalle, au moment même où on l’accuse d’être avec son compagnon en train de commettre un sabotage. Pièce centrale du dossier, un procès-verbal de filature vide, construit de toute pièce et à charge par des pieds-nickelés, à tel point que la justice va interroger cette vingtaine de flics de la sous-direction antiterroriste et de la direction centrale du renseignement intérieur.Dans ce combat contre l’arbitraire d’État sauce Sarkozy, on est loin d’être sûr que les accuséEs puissent bénéficier de la bienveillance du nouveau pouvoir. Quelques jours après avoir livré Aurore Martin à l’État espagnol, Valls n’a-t-il pas réaffirmé sa volonté de coopération policière pour lutter contre les « formes de violence provenant de l’ultragauche, de mouvements d’anarchistes ou d’autonomes » ? Une rhétorique qui rappelle des choses…Manu Bichindaritz