« Je traverse la rue, je vous trouve un travail ». C’est ainsi qu’Emmanuel Macron s’est adressé à un jeune diplômé actuellement au chômage, lors des journées européennes du patrimoine, le 15 septembre. Nombreux sont celles et ceux qui se sont, à juste titre, élevés contre cette énième déclaration arrogante, après celles sur les « illettrées » de Gad, les « gens qui ne sont rien », les « fainéants », ceux qui « foutent le bordel », etc.
Il va de soi que cette nouvelle saillie du président des riches méritait d’être relevée… et critiquée. Mais alors que les spécialistes de la communication politique s’interrogent une fois de plus sur la « stratégie » de Macron, cette nouvelle injure, cette fois contre les chômeurEs, doit être prise pour ce qu’elle est fondamentalement : l’expression d’un mépris de classe assumé de la part d’un président qui, s’il s’inscrit dans une continuité politique avec ses prédécesseurs, n’en est pas moins l’incarnation d’une « nouvelle génération » pour laquelle on fait de la politique comme on monte une start-up, ce qui témoigne d’une singulière vision du monde…
Les « dérapages » de Macron n’en sont pas, et l’intérêt de savoir à quel point ce type de déclaration est le produit d’une stratégie délibérée de communication est pour le moins limité. Ce qui compte est bel et bien ce que donne à voir la Macronie, dans ses calculs comme dans sa spontanéité : un mépris pour les pauvres, les chômeurEs, les fonctionnaires, les syndicalistes, les salariéEs en général, doublé d’une éthique qui rend comptable chaque individu de la situation dans laquelle il se trouve, indépendamment des rapports sociaux de domination et d’exploitation.
Mais ce que donnent aussi à voir Macron et les siens, c’est à quel point cette petite clique de start-upeurs est coupée des réalités économiques et sociales, y compris celles à propos desquelles ils donnent d’arrogantes leçons : nombre de journalistes ont ainsi pris au mot le président et ont « traversé la rue », pour finalement constater qu’aucun des bars et restaurants du quartier dans lequel Macron faisait le beau n’était disposé à recruter qui que ce soit…
Cette anecdote sonne comme un rappel : la politique du gouvernement est destructrice, et ne porte en elle aucun espoir, pas même le moindre signe d’une amélioration même très partielle de la situation économique et sociale. Gageons que le pouvoir l’apprendra assez vite à ses dépens : traverser la rue ne servira à rien aux millions d’oppriméEs et d’exploitéEs du pays mais, pour se débarrasser de Macron et de ses politiques, prendre la rue demeure l’objectif, et la clé.
Julien Salingue