Le lendemain de ses propos indignés – de la « colère », de la « honte » – au sujet du livre d’entretiens de François Hollande, Manuel Valls s’envolait pour l’Afrique. Un voyage de quatre jours au Togo, au Ghana, qui s’est achevé dimanche en Côte d’Ivoire... le jour même du référendum que le dictateur Ouattara avait programmé pour faire plébisciter une constitution qui conforte son pouvoir personnel et qui est remise en cause par de très nombreux opposants. En revanche, Valls a soigneusement évité le Gabon, où l’élection de Bongo fils a été violemment contestée par une partie de la population.
Émoustillé par la perspective – rendue plausible par les frasques de Hollande – de devenir le candidat du PS à la présidentielle, Valls cherche à se donner une stature internationale de chef d’État. Il se rend en Afrique et multiplie les grands discours sur « le continent d’avenir ». Il assure que « tout cela [la Françafrique] est derrière nous », que « la démocratie s’installe progressivement »... Quel cynisme quand, en Côte d’Ivoire, des centaines d’opposants politiques croupissent dans les prisons, quand des responsables de massacres de 2010-2011 sont impunis ; quand, au Ghana, les manifestants sont réprimés à coups de balles réelles ; quand, au Gabon, principalement dans l’intérêt de Total, les troupes françaises soutiennent Bongo fils, dont la réélection a été assurée par des fraudes électorales massives... Les multinationales françaises sont concurrencées par leurs rivales étatsuniennes ou chinoises, mais ce sont essentiellement elles qui font main basse sur les marchés publics et les entreprises récemment privatisées dans leur pré carré africain.
C’est en représentant de leurs intérêts que Valls s’est donc rendu en Afrique, qu’il a visité les casernes des troupes françaises au Ghana et en Côte d’Ivoire, au mépris de la plus grande partie des populations qui luttent pour leur survie, qui subissent une exploitation et une oppression terribles. Peu lui importe. Il rêve de devenir le responsable en chef de l’impérialisme français, entièrement dévoué aux intérêts des Bolloré, Delmas, Eiffage, Orange, Total, Thalès, les vrais maîtres de la Françafrique.
Galia Trépère