Publié le Mercredi 22 septembre 2021 à 12h34.

Mises à pied dans la santé: la politique du gouvernement et ses conséquences

Dans le cadre de la loi relative à la gestion de la crise sanitaire qui a instauré un « pass sanitaire », la vaccination contre le coronavirus est obligatoire depuis le 15 septembre pour les personnels des hôpitaux, des Ehpad ainsi que pour les pompiers, les ambulanciers et les forces armées à l’exception des policiers qui en sont exemptés parce qu’ils seraient très nombreux à être vaccinés... alors qu’il n’existe officiellement aucune statistique sur ce sujet.

Selon Santé publique France, au 7 septembre 88,6 % du personnel serait vacciné en établissement de santé, 88,1 % en Ehpad et 93,9 % parmi les professionnels de santé exerçant en libéral. Ces chiffres peuvent avoir évolué le 15 septembre, date à laquelle entrait en vigueur l’obligation vaccinale. Véran, ministre de la Santé, prétend que 3 000 soignantEs auraient été suspendus le 15 septembre. Ce chiffre est certainement inférieur à la réalité afin de cacher l’aggravation de la crise des hôpitaux, déjà en sous-effectif chronique.

La réalité en chiffres

À l’Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP), officiellement 99,5 % des 100 000 agentEs auraient été vaccinés, et 340 salariéEs suspendus, mais ils et elles seraient entre 400 et 500 selon les syndicats. De plus 30 salariéEs auraient démissionné et 200 seraient en arrêt de travail dont 6 % en affection de longue durée ou maternité.

Au CHU de Besançon, 91 % du personnel a fait remonter son schéma vaccinal, complet ou pas. Pour 5 500 agentEs, cela représente donc 500 personnes menacées de suspension, autant qui ne pourront pas travailler. Toujours dans le Doubs, à l’hôpital de Novillars 18 collègues sur 700 ont été suspendus (dont des agents en arrêt de travail), 15 soignantEs et trois salariéEs de « services supports ».

Des professionnelEs de santé de toutes les catégories sont mis à pied sans salaire, non seulement dans les hôpitaux, mais aussi dans les cliniques, les différentes maisons de retraite et dans quasiment tous les établissements de santé. Selon le décret du gouvernement, cette situation pourrait durer jusqu’au 15 novembre…

La politique répressive du gouvernement ne peut qu’aggraver la crise des hôpitaux, leurs difficultés de fonctionnement déjà considérables en raison des sous-effectifs permanents, au détriment des soignantEs et des patientEs. Nous avons par exemple déjà eu connaissance de sorties prématurées de patientEs au lendemain d’opérations importantes, la seule solution pour faire face au sous-effectif. Les reports d’opérations qui étaient déjà nombreux depuis le début de la pandémie vont sans aucun doute se multiplier. La souffrance au travail des soignantEs en ­activité ne pourra que s’accentuer..

Du côté des mobilisations

Les directions syndicales y compris de la CGT et de Solidaires, dénoncent le pass sanitaire et la politique sanitaire du gouvernement, mais n’ont pas eu la volonté de construire la grève. Il y a eu cependant quelques grèves en régions, comme par exemple à l’Institut thérapeutique éducatif et pédagogique (ITEP) de Revigny dans le Jura, où les professionnelEs de santé ont demandé que leur texte circule, ce que nous faisons volontiers d’autant plus qu’il représente ce que vivent quotidiennement les professionnels de santé dans leurs divers établissements : « Le mouvement de grève de l’ITEP de Revigny a émergé le 06/09/21. Il est venu se confronter à une politique abusive qui brise de plein fouet les valeurs qui sous-tendent et portent à chaque instant nos métiers dans un secteur depuis trop longtemps marqué par de nombreuses et inacceptables carences ; rémunérations insuffisantes, manque de place en pédopsychiatrie. […]

Nous agissons également en réponse à une loi discriminatoire et en soutien à nos collègues suspendus sans salaire pour «non présentation du pass sanitaire» et en réaction à ces sanctions inacceptables et discriminatoires.

Mais plus encore, nous dénonçons des conditions de travail dégradées, postes non pourvus à différents niveaux de l’institution, turn-over important, suppression du télétravail qui était jusqu’alors fortement encouragé depuis le confinement et qui permettait de désengorger les bureaux afin de limiter les risques sanitaires. Nous sommes conscients que les jeunes que nous accueillons et leur familles se retrouvent démunis et isolés sans notre soutien, et réclamons donc les moyens nécessaires pour réaliser les missions qui nous sont confiées par les pouvoirs publics, et désirons leur rappeler l’impossibilité qui est la nôtre d’exercer nos métiers sans certains prérequis indispensables : le respect de l’intégrité psychique et physique, le respect des libertés individuelles fondamentales des citoyens. »

Macron, se prenant pour le chef épidémiologiste du pays, avait annoncé début septembre que les contraintes seront levées et que l’on se passera du pass sanitaire dans trois semaines. Mais il a rectifié son propos le 16 septembre en indiquant que c’est seulement lorsque les conditions le permettront que les restrictions pourront être progressivement levés dans certains territoires.

Beaucoup d’inconnues demeurent sur l’évolution du virus avec notamment l’impact de la rentrée scolaire, l’apparition des variants… L’OMS annonce qu’il est indispensable de renforcer les mesures de luttes anti-infectieuses et qu’il est pour cela nécessaire de prendre des mesures de santé publique et sociale. Mais Macron et son gouvernement préfèrent l’autoritarisme et s’apprêtent même à faire payer aux patientEs les tests de dépistage.