Les salariés d’Airbus se sont mis en grève après la faible revalorisation salariale proposée par la direction. La suite de la grève dépend des négociations salariales du 4 mai. "On n’avait pas vu ça depuis 1974 ! » C’est ce qu’ont déclaré, ravis, beaucoup d’anciens de la boîte, pendant le blocage du C40, bâtiment toulousain où sont déchargés les Bélugas (gros avions cargos qui assurent le regroupement des éléments venant des différentes usines du groupe). En effet, des chaînes d’assemblage au bureau d’étude, le ras-le-bol est général. Dans tous les secteurs, la politique de la direction au service des actionnaires se fait sentir : délais intenables pour les nouveaux programmes (A350, A400M) au bureau d’étude ou heures supplémentaires à gogo sur les chaînes de montage. Personne ne fait confiance à la direction ; la majorité des dirigeants se sont remplis les poches dans les affaires de délit d’initiés et, depuis, la privatisation de tous les nouveaux programmes sont quasiment des fiascos. Louis Gallois, en prenant la tête de EADS en 2006, avait promis aux actionnaires une rentabilité à deux chiffres. Il est de plus en plus évident pour tout le monde que cette recherche de rentabilité à court terme est incompatible avec des programmes où les investissements sont lourds, demandent des innovations et de la recherche technologique permanente. Même dans des secteurs considérés, jusque-là, comme privilégiés, le capital est à l’offensive. Ainsi, la direction d’Airbus veut tourner la page de 40 ans de « relations contractuelles » qu’elle avait avec FO, le syndicat majoritaire. Cette année, lors des négociations salariales, elle a fait une proposition de 1,9 % d’augmentation, faisant comprendre que c’était à prendre ou à laisser. Le délégué syndical central de FO le reconnaît lui-même : « on n’a pas l’habitude d’être traité comme ça ». D’où un bras de fer entre le syndicat et la direction sur un réel fond de mécontentement des salariés. Bras de fer d’autant plus motivé par les élections professionnelles qui auront lieu à la fin de l’année. Dans cette grève, il n’y a pas de place pour la démocratie ; pas d’assemblée générale, pas de vote à main levée, l’intersyndicale décide et les grévistes exécutent. Plus précisément, FO fait entériner ses décisions par l’intersyndicale. Mais bien que très « verticale », cette grève a malgré tout créé des espaces de liberté et des relations nouvelles entre collègues de travail. Il y avait comme un air de fête sur les chaînes d’assemblage où la production tournait au ralenti. Nous étions contents de nous retrouver et de parler de nos problèmes. Depuis vendredi 30 avril, le blocage du C40 est levé en attendant la reprise des négociations mardi 4 mai ; la grève est donc suspendue. FO a présenté la reprise des négociations comme une victoire des salariés… Cette décision de lever le blocage du C40 est très mal passée sur les chaînes d’assemblage. À l’issue des négociations, la direction a proposé 1 % d’augmentation générale et 1,5 % au mérite, une prime exceptionnelle de 500 euros et 250 embauches d’intérimaires dont 186 jeunes sortis les deux dernières années du lycée professionnel « Airbus ». Cela ne fait pas le compte pour FO qui doit consulter sa base et peut-être réunir une intersyndicale le 7 mai. Entretemps, dans les ateliers, la bagarre peut repartir. Correspondant Airbus Toulouse
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