Publié le Dimanche 5 mai 2013 à 11h03.

Amnistie sociale : ils ont franchi le mur des cons

Il y a des décisions dont le caractère symbolique est presque aussi important que le contenu. Le refus de faire voter par le Parlement une loi d’amnistie sociale en est un des meilleurs exemples.«Je veux être clair : la position du gouvernement dans ce débat sera non, nous ne sommes pas favorables à cette amnistie, ni à aucune autre (…) Ça a été la position du président de la République depuis l'origine et ce qui se passe en ce moment montre qu'il faut avoir une seule réponse, le respect de la loi républicaine pour tous (…) Le droit à manifester, le droit à faire grève sont des grands principes constitutionnels. Mais justement, pour respecter la force de ces principes, il ne faut pas permettre en quelque moment que ce soit des débordements » qui « entrent dans le champ de la loi pénale » a déclaré Alain Vidalies, ministre des Relations avec le Parlement sur France Info mercredi 24 avril.Ce gouvernement n’est revenu sur pratiquement aucune des mesures les plus réactionnaires, les plus antisociales de Sarkozy : limitation du doit de grève, élections professionnelles tous les quatre ans, mise en cause de la médecine du travail, etc. Dans le même temps, refusant toute loi contre les licenciements, le gouvernement offre une loi sur leur facilitation avec la légalisation de l’Accord national interprofessionnel sur la prétendue sauvegarde de l’emploi. « Selon que vous serez puissant ou misérable… »À l’opposé, contre les salariéEs qui défendent leurs droits, leurs emplois, il s’agit de préserver l’ordre républicain : matraquage, gazage des manifestantEs d’Arcelor (un salarié a perdu un œil), des salariéEs souhaitant manifester dans le Mondial de l’automobile, des ­salariéEs de Goodyear devant le siège de l’entreprise où se tenait le comité central d’entreprise devant lequel l’employeur annonçait la liquidation de 1 100 emplois, des salariéEs de PSA Aulnay convoquéEs devant les flics sur ordre de Valls, ou d'autres licenciés pour un prétendu jet d’œuf ou une bousculade.Dans le même temps, pas un patron n’est condamné pour les centaines de milliers d’emplois supprimés pour sauvegarder les profits de quelques-uns. Pas une condamnation pour ces suppressions d’emplois synonymes de misère, destruction de vies, suicides. Peu de condamnations de patrons pour les milliers de salariéEs gravement blesséEs ou décédéEs au travail ou qui se sont suicidéEs, comme ce salarié de Renault Cléon mettant clairement en cause le « système » Renault. Carl Ghosn, condamné un jour ? Pas de condamnation pour tous ces flics qui matraquent, tuent jeunes et immigréEs. Pas de condamnations pour celles et ceux qui attaquent les maternités et appellent à la guerre civile pour empêcher le vote de la loi du mariage pour tous. Et, pour une juge, Marie-Odile Bertella-Geffroy, qui risquait d’inculper des employeurs responsables de l’exposition à l’amiante de milliers de salariéEs, le premier prétexte (trop longue présence à son poste) fut bon pour s’en débarrasser.Mais quand même, quel culot, quel manque de décence, pour un gouvernement obligé d’exfiltrer Cahuzac, le ministre de l’austérité, et qui se couche devant les cris de Parisot et de la droite, qui donne un gage scandaleux de plus de soutien au patronat. Et des députés UMP qui, du coup, ont même osé pousser le bouchon plus loin en proposant une loi d’amnistie fiscale !Justice de classe, politique de classe, gouvernement de classe, c’est bien plus qu’un changement de République qu’il nous faut imposer, par la lutte, les mobilisations.Robert Pelletier