Publié le Vendredi 30 avril 2010 à 18h23.

Chômage : faire payer les responsables

L’Association pour l’emploi, l’information et la solidarité (Apeis) tiendra son 6e congrès du 30 avril au 2 mai. Corinne Siergé, porte-parole, a répondu à nos questions. Entre les effets de la crise et la fusion Assedic/ANPE, comment l’Apeis voit aujourd’hui la situation des chômeurs ? L’explosion du nombre de chômeurs à 4 465 200 selon les chiffres officiels en catégorie ABCDE et le million de personnes en fins de droits, ont entraîné encore plus de dysfonctionnements dans les Pôles emploi. Cela n’apporte aucune aide aux demandeurs d’emploi. Pis encore, ils sont fliqués, radiés mais en aucun cas aidés. Pour une raison simple, il n’y a pas d’emplois créés mais détruits, oui, et à la pelle : 300 000 dans l’industrie depuis le début de l’année ! La fusion ratée a des effets dramatiques sur des dizaines de milliers de chômeurs. Déjà en termes de proximité, par exemple l’ANPE comptait 1 150 sites et les Assedic 650. Après mixage, il va en rester 950, soit la moitié. Les agences sont souvent éloignées du centre-ville avec les difficultés de transports et de temps passé que cela représente.Il faut que la situation s’améliore pour les femmes et les hommes et qu’elle cesse de les plonger dans la précarité, la misère. Nous savons bien que le meilleur moyen de lutter contre la précarisation et l’appauvrissement est d’indemniser correctement les chômeurs, mais pour cela, il faudrait que Pôle emploi travaille dans l’intérêt du chômeur et pas uniquement dans l’intérêt du patronat. Il faut changer la base de cotisations et ne plus prendre en compte la seule masse salariale, ce qui dans les faits favorise les patrons qui licencient ou précarisent. Il faut également prendre les bénéfices et les profits des entreprises qui continuent de s’enrichir pendant les licenciements. Que penses-tu du plan qu’a dévoilé le gouvernement, consistant à octroyer à certains chômeurs en fin de droits une allocation de 456 euros ?2010, année record pour Pôle emploi. Un million de chômeurs en fin de droits cette année. Combien les années précédentes ? Et celles à venir ? Environ 400 000 ont bien failli se retrouver sans rien. Dans un élan de générosité et pour sauver sa popularité Sarkozy nous pond tout un tas de mesurettes, du contrat aidé en passant par la formation, le pompon étant l’allocation spécifique de crise. En grattant un peu, on s’aperçoit que pour percevoir 456 euros, il est interdit de refuser un contrat aidé ou une formation. Qui peut refuser sans être radié ? Ce n’est qu’un effet d’annonce qui risque fort de prendre le même chemin que la prime de 500 euros en direction des jeunes qui a connu un véritable échec. Pour financer les contrats aidés et la formation, il faut trouver 800 millions d’euros. D’où le réflexe du gouvernement du transfert de charges. Comme à l’habitude, les régions devront payer. On le sait, l’explosion du chômage et du RSA a eu beaucoup de conséquences financières sur les départements, les aides pour l’enfance  ou le paiement de l’électricité, aides à la cantine pour les familles qui n’en peuvent plus… Le 6e congrès de l’Apeis se tient le week-end prochain. Quelles sont les perspectives de l’association pour les mois  à venir ?Je tiens à dire que malheureusement notre association va perdurer. Notre plus grand souhait aurait été qu’elle disparaisse, mais l’état de la société en a décidé autrement. Je ne vais pas faire la conclusion du congrès avant sa tenue. Mais une chose est sûre, il faut que nous soyons encore au plus près des chômeuses et des chômeurs et de leurs préoccupations. Quelques pistes ont d’ores et déjà été avancées, comme relancer partout où c’est possible les réseaux d’alerte contre les saisies, les expulsions locatives et les coupures d’énergie. Nous allons donc continuer de réfléchir pendant ce congrès : de quelle organisation nous devons nous doter pour être encore plus utiles. Nos seules forces sont la colère, l’indignation, le refus de la résignation et la détermination à nous battre et à résister. Il n’y a pas de fatalité. Nous devons être nombreux à revendiquer de nouveaux droits, du respect, de la dignité et des moyens convenables d’existence ! Notre slogan fondateur (il y a 23 ans) : « Avec l’Apeis, plus jamais seul », reste plus que jamais d’actualité, les chômeurs et les précaires doivent s’organiser, constituer une force, afin de peser sur leur vie en obtenant de nouveaux droits. S’entraider, se tenir informer, connaître ses droits, compter sur d’autres et compter pour d’autres, ne pas se retrouver isolé, partager, être utile au bon sens du terme, avoir une place et un rôle, voilà ce que nous souhaitons et pouvons faire ensemble, sans attendre. Nous allons aussi lancer une grande campagne de pétition Faim de droits ! Nous exigeons l’indemnisation décente de toutes les formes de chômage et un changement des règles de financement pour faire payer les vrais responsables qui licencient et précarisent pour faire toujours plus de profits. Voila les perspectives de l’association pour les mois à venir.

Propos recueillis par Dominique Angelini