Le gouvernement espérait qu’après l’été, la mobilisation des intermittentEs et des précaires s’essoufflerait. Une fois encore, il a sous-estimé ce mouvement qui dure depuis maintenant 6 mois.
Soutenue par la Coordination des intermittents et des précaires (CIP), la CGT spectacle avait déposé pour mercredi 1er octobre un préavis de grève. La date n’était pas choisie au hasard. C’est, en effet ce jour-là qu’entrait en vigueur la deuxième partie de la convention de l’assurance chômage avec, entre autres, les « droits rechargeables », axe emblématique de la réforme : abandon du principe de mutualisation et de solidarité inter-professionnelle, entrée dans un système de capitalisation. Concernant ces nouveaux « droits », les chômeurEs du régime général sont les premiers touchés. C’est d’ailleurs là un des enjeux immédiats de la lutte : faire connaître le scandale de cet accord à celles et ceux qui sont prioritairement concernéEs. Dans ce but, de nombreuses actions ont lieu devant des Pôle emploi.
Une rentrée offensive et déterminéeLa grève du 1er octobre avait, en outre, valeur de test : serait-elle suivie ? Le mois de juillet fut intense à l’occasion des différents festivals et ce, malgré l’instauration par le gouvernement, en juin dernier, d’une « Mission intermittence » chargée d’éteindre l’incendie (et qui doit se tenir jusqu’à la fin de l’année). À la veille des vacances, dans les AG, la conviction était unanime qu’il fallait poursuivre les luttes en septembre et construire, avec d’autres, une rentrée sociale. Celle d’y parvenir était plus relative. Qu’adviendrait-il, en effet, du mouvement une fois passé l’été ? Le rapprochement initié entre les intermittentEs du spectacle et les autres précaires tiendrait-il ? Serait-il possible de renouer avec la fréquence, l’inventivité des actions du printemps dernier ? Comment maintenir l’articulation, plutôt réussie, entre l’auto-organisation des précaires et la spécificité des enjeux de l’intermittence, entre radicalité et unité, entre expertise des revendications et perspective d’ensemble ?Réunie fin août-début septembre à Dijon (voir l’Anticapitaliste n°255), la coordination a donné le « la » de cette rentrée : elle serait offensive et déterminée. Sur fond dramatique d’austérité, notamment dans le domaine culturel, et tandis que Rebsamen se vautrait dans une infâme surenchère antisociale (anti-chômeurs), des AG se sont tenues un peu partout, annonçant clairement la reprise de la mobilisation.
Vers l’amplification ?La journée de mercredi est encourageante et témoigne de la vitalité retrouvée du mouvement. De très nombreux centres dramatiques nationaux et régionaux se sont mis en grève (Besançon, Tours, Aubervilliers, Gennevilliers et à Paris). La direction du travail de Grenoble et les Pôle emploi de Toulouse, Lille et Lyon ont été occupés tandis que les agences de Montpellier, Marseille, du Mans étaient re-décorées, qu’une braderie des meubles du Medef et de la Cfdt était proposée à Caen et que l’électricité gratuite pour les quartiers populaires était imposée à Besançon… Le lendemain, un accueil militant a obligé Rebsamen à fuir piteusement le Salon « Paris pour l’emploi »...Cette journée du 1er octobre est donc une étape réussie et d’importance. Elle est riche des acquis des six mois de lutte qui la précèdent : sans illusion sur le PS et le gouvernement (légitimé, bien tardivement, par Aurélie Filippetti qui justifiait son refus de rester au gouvernement par le fait que l’accord n’était « pas conforme aux engagements » du PS...), experte et nourrie des amples discussions sur le travail et l’emploi, animée par le désir des possibles convergences.La reprise du mouvement acquise, se pose dès lors la question de son amplification et de son élargissement. « Nous sommes tous concernés, soyons tous mobilisés », rappellent les différentes CIP (à Paris et en régions), désignant par là la nécessité d’un mouvement d’ensemble d’opposition au projet de société Medef-PS dont l’accord Unedic du 22 mars est l’une des étapes.
Olivier Neveux