Quelques mois à peine après les déclarations de Sarkozy sur l’aspect dorénavant invisible des grèves en France, les conducteurs RATP et SNCF des lignes A et B viennent de rappeler qu’on peut déclarer, écrire, se vanter de la fin de la lutte des classes, elle n’en demeure pas moins toujours là et encore vivace.
En effet, les trois grèves qui se sont déroulées dans la semaine du 9 novembre ont toutes, par leur ampleur ou leur dénouement, de quoi redonner courage à ceux qui luttent. Sur la ligne A du RER, la grève de 24 heures à l’appel de l’ensemble des organisations syndicales portait sur les conditions de travail et de rémunérations des agents et a été très fortement suivie. Parallèlement, deux autres grèves sur le RER B concernaient les agents RATP et SNCF car cette ligne est exploitée dans sa partie sud par la RATP et dans sa partie nord par la SNCF.
Si les revendications des agents RATP portaient sur une meilleure rémunération et celles de la SNCF sur de meilleures conditions de travail, dans les deux cas une même logique était à l’œuvre : ne pas avoir peur de revendiquer une vie meilleure, même en temps de crise.
Comme à l’accoutumée, les médias et certains politiques se sont focalisés sur la gêne occasionnée pour les voyageurs, nous ressortant le discours de la prise d’otages et de l’impérieuse nécessité de durcir la loi sur le service minimum. Ils étaient bien moins nombreux à se faire l’écho des revendications des grévistes. Pourtant quel est le travailleur, usager du RER ou pas, qui ne pourrait se reconnaître dans la revendication des grévistes sur le pouvoir d’achat et les cadences de travail toujours plus dures ? Il faut avoir une dose de mauvaise foi inouïe pour ne pas se rendre compte que ces revendications sont partagées par l’ensemble des travailleurs. À croire qu’il est bien plus politiquement correct de se focaliser sur la colère des usagers que d’éclairer les travailleurs sur le chemin à prendre. Surtout lorsque ce chemin mène à la victoire.
Car les collègues de la SNCF, à l’appel des syndicats SUD-rail et FO, pourtant lâchés par les fédérations CGT et CFDT la veille de la grève, mais heureusement pas par les grévistes, ont gagné sur l’ensemble de leurs revendications au bout de quatre jours.
La direction de la RATP, deux jours plus tard, cédait elle aussi. Ce sont deux victoires très importantes que viennent d’arracher nos camarades. Victoire contre le fatalisme d’une part, victoire également sur les manœuvres bureaucratiques de syndicats parfois plus prompts à vouloir éviter une grève qu’à la préparer, mais c’est enfin et surtout une victoire concrète, un exemple vivant qui doit et devra faire des petits dans les semaines à venir. Fabien Sacor