Même si la participation n’a pas atteint le niveau espéré par le syndicat des vignerons de l’Aude, ce dernier peut se targuer d’un succès : plus de 2 000 manifestants ce samedi 25 mars alors que le département compte 5 000 exploitations viticoles.
Adhérent à la FNSEA mais revendiquant son autonomie, le syndicat a su donner une expression à la colère des viticulteurs. Quelques maires de droite étaient présents mais discrets, l’absence des élus socialistes était en revanche flagrante dans un département qu’ils dirigent...
Après l’évocation de la révolte vigneronne de 1907, les orateurs ont dénoncé la concurrence des vins espagnols dont les importations augmentent, facilitées par les bas salaires et l’absence de normes, ainsi que l’attitude des négociants. Mais si les chiffres sont exacts, les importations concernent des vins en vrac, sans IGP ni cépage, des vins courants dont la consommation en France est faible : traquer les bouteilles dans les rayons des supermarchés est inutile, la plupart des importations repart après coupage vers d’autres pays.
En concurrence
C’est le nœud du problème : il s’agit d’abord d’une guerre commerciale pour placer des vins à bas prix sur les marchés émergents. La Confédération paysanne – qui avait pris la décision discutable de boycotter la manifestation – a souligné à juste titre le risque de vouloir « faire pisser » la vigne, perdant le bénéfice de la politique de qualité.
Il reste que, faute d’une alternative anticapitaliste crédible, beaucoup, se sentant lâchés par un PS auquel allait traditionnellement leur vote, à se tourner vers les fausses solutions du protectionnisme, même dans un secteur où la balance commerciale est très excédentaire. Les opérations revendiquées contre des citernes espagnoles étaient là pour appuyer la menace de nouvelles actions musclées, menace alternée avec des appels à la raison et à l’aide des pouvoirs publics. Sans qu’on ne sache au juste s’il s’agit de débordements ou d’un partage des rôles, le saccage du rayon vin d’un supermarché par une cinquantaine de cagoulés juste après la dispersion n’est pas rassurant.
Gérard Florenson