Malgré la ratification par l’Assemblée nationale des ordonnances le 28 novembre, l’offensive du gouvernement n’est pas terminée. En effet les députés ont approuvé le contenu de cinq ordonnances, mais la loi d’habilitation en prévoyait six (plus une concernant le prélèvement à la source).
Le gouvernement a donc transmis aux organisations syndicales le projet de sixième ordonnance, dite ordonnance « balai ». Le but affiché est de corriger les coquilles contenues dans les précédentes – c’est que le gouvernement était pressé et n’a pas pris le temps de se relire ! Mais en y regardant de plus près, on se rend compte que cette sixième ordonnance approfondit la liquidation des droits des salariéEs, notamment en ce qui concerne les institutions représentatives du personnel (IRP). Le diable – ou le patronat – gît dans les détails.
Toujours plus de reculs
Elle consacre ainsi la disparition de la négociation syndicale dans les entreprises qui mettront en place le conseil d’entreprise. Institué par voie « d’accord », ce dernier se substituera ensuite intégralement aux syndicats pour négocier l’ensemble des accords d’entreprise ou d’établissement, alors que l’ordonnance de septembre maintenait, même en cas de constitution d’un conseil d’entreprise, le monopole des organisations syndicales pour la conclusion des accords relatifs aux élections professionnelles ou aux plans sociaux. Les employeurs et les syndicats « maisons » ont donc désormais une possibilité légale de faire disparaître les organisations minoritaires qui seraient un peu trop contestataires.
Elle rend également plus facile d’échapper à la création des instances représentatives du personnel (IRP). La mise en place du comité social et économique ou des délégués syndicaux était obligatoire si 50 salariéEs ou plus sont employés pendant douze mois consécutifs ou non au cours des trois dernières années. Désormais il faudra que ce seuil soit franchi pendant douze mois obligatoirement consécutifs. On imagine comment des entreprises allégeront opportunément leur effectif pendant un mois ou deux… Cerise sur le gâteau, il sera possible par « accord » d’élire moins de représentantEs que ce que prévoit la loi ! Enfin, « l’ordonnance balai » en profite pour balayer les IRP de la RATP, qui jusque-là échappaient à la fusion forcée car elles reposaient sur des textes dérogatoires.
Le gouvernement ne s’arrêtera que lorsque nous l’arrêterons
La prétendue rectification des coquilles ne se cantonne pas aux IRP, puisque l’ordonnance permet dans plusieurs domaines de déroger à la loi par accord d’entreprise là où un accord de branche, beaucoup plus difficile à obtenir, était nécessaire : temps partiel, travail du dimanche, travail le weekend en équipes de suppléance, possibilité de dérogation au repos hebdomadaires pour les jeunes travailleurs…
Et d’autres cadeaux de Noël sont encore distribués aux patrons, comme la possibilité d’omettre les délais de contestation dans la lettre de licenciement économique.
Le gouvernement nous confirme avec cette sixième ordonnance qu’il ne s’arrêtera que lorsque nous l’arrêterons. La stratégie des directions syndicales et le niveau de mobilisation ne l’ont pas permis cet automne, faisons en sorte de prendre notre revanche en 2018.
Comté inspection du travail Île-de-France