Pas de médecin à la campagne ou au pied des tours dans les banlieues ? Moins de 10 % des jeunes médecins s’installent en médecine libérale. 57 heures par semaine, une pratique au plus près des difficultés quotidiennes des patients, mais sans les moyens réels d’y porter remède. Des inégalités régionales qui se creusent et des difficultés d’accès pour les plus pauvres, à cause du paiement à l’acte. Pas de médecine de prévention, sociale ou environnementale, des relations difficiles avec la médecine hospitalière et une pression incessante des caisses pour réduire les dépenses de santé… La médecine libérale est en crise. Nicolas Sarkozy a demandé un rapport au docteur Hubert, ancien ministre de la Santé, pour servir de trame à sa future loi pour la médecine ambulatoire, annoncé pour 2011. Attention, danger ! « Moins d’actes mieux payés est le rêve de tout médecin. Moins d’actes médicaux inutiles est le rêve de tout organisme payeur ». « Le tarif des consultations pourrait osciller entre 10 et 70 euros »… L’objectif : recentrer l’intervention des médecins « autour d’actes qui correspondent véritablement à leur valeur ajoutée » : « Des gestes simples mais répétitifs pourront demain être assurés par des professionnels non médecins, opération de la cataracte ou pose de prothèse simple, assurables par des techniciens spécialisés ». On abandonne une médecine générale qui prend le temps d’écouter le patient. La consultation graduée, super-paiement à l’acte, aggravera les difficultés d’accès aux soins pour ceux qui ne peuvent pas avancer le prix de la consultation. Neuf millions de personnes renoncent chaque année à se soigner. Le rapport Hubert veut recentrer l’assurance maladie et « la pratique des médecins généralistes vers les risques lourds », cela laisse un espace plus grand pour les complémentaires « mutuelles et assureurs privés » qu’il faut « faire entrer dans le jeu conventionnel ». Au moment où les crédits publics s’assèchent pour les réseaux de soins centrés sur le patient, les assureurs développent leurs propres réseaux santé, comme Swiss life autour du diabète. Les « petits risques » sont de fait abandonnés à l’auto-médication, aux dépassements d’honoraires, et aux conventions spécifiques avec les assurances, pour ceux qui en auront les moyens. Reprenant l’idée des maisons de santé dans les zones sous- médicalisées, le rapport Hubert veut en faire le champ d’expérimentation de sa contre-réforme.La réponse du mouvement ouvrier passe par le tiers-payant généralisé et l’interdiction des dépassements d’honoraires. La fin du paiement à l’acte, un paiement à la fonction incluant un temps de soins, de prévention, d’éducation à la santé et de formation indépendante. Une formation des futurs généralistes centrée sur la médecine de ville, indépendante des trusts pharmaceutiques. Et des maisons de santé pluridisciplinaires réunissant médecins, infirmières, kiné, labo, psychologues, nutritonnistes, travailleurs sociaux… centrés autour de la santé globale des habitants du quartier. Cela s’oppose aux maisons de santé avec tarification graduée pilotées par les objectifs de maîtrise de dépenses de santé de la Sécu et les profits des assurances privées du rapport Hubert. Frank Cantaloup
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