Publié le Mercredi 19 juin 2019 à 14h27.

Retraites : l’attaque ne va pas tarder !

Dans son discours de politique générale prononcé à l’Assemblée nationale le 12 juin, Édouard Philippe a confirmé « la mise en place d’un système universel de retraite ». Il a aussi insisté sur la nécessité de travailler plus longtemps pour faire valoir ses droits à une pension, à cet effet des mesures sont envisagées à court terme.

Le rapport annuel du Comité d’orientation des retraites (COR) devait être présenté en juillet mais, comme par hasard, il a été publié en même temps que les annonces gouvernementales. Sur la base de prévisions « à l’horizon 2070 » tout à fait fantaisistes – qui peut connaître la démographie et la situation de l’économie dans plus de 50 ans ? – le COR annonce un déficit des retraites de près de 10 milliards en 2019 et un retour à l’équilibre... en 2042 ou 2056 ! Quant à la commission des comptes de la Sécurité sociale, elle annonce d’ores et déjà un déficit de la Sécu entre 1,7 et 4,4 milliards d’euros en 2019… Ce qui permet au gouvernement, comme ses prédécesseurs, d’instrumentaliser ces « études » pour préconiser des « économies » et promouvoir des « réformes ».

Des « économies »

Ainsi, le Monde peut annoncer que « l’exécutif est à la recherche d’économies à court terme pour financer les mesures d’urgence annoncées depuis décembre ». Il précise que « l’hypothèse d’une accélération du calendrier de la loi Touraine de 2014 est sur la table, et pourrait intervenir dès cet automne dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020 ». La ministre de la Santé et des Affaires sociales du gouvernement Hollande avait promulgué une « loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites ». La durée de cotisation nécessaire pour bénéficier d’une retraite à taux plein à partir de 62 ans devait être allongée, entre 2020 et 2035, d’un trimestre tous les trois ans. C’est insuffisant pour Macron, la durée de cotisation devrait donc être augmentée à un rythme qui n’est pas encore précisé, mais évidemment plus rapide.

La contre-réforme

Le Haut commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, doit présenter ses « recommandations en faveur d’un système universel » à la mi-juillet. Il projette de remplacer le système actuel de retraite, à prestations définies, par un régime unique et par points. Les 42 régimes de base, ainsi que les régimes complémentaires, fusionneront pour ne former qu’une instance unique, la pension versée ne sera plus proportionnelle à un salaire de référence et il ne sera donc pas possible de connaître le montant de sa pension qui dépendra de la valeur du point fixée chaque année selon le bon vouloir du gouvernement. Les mesures concrètes concernant les dispositifs de solidarité, à savoir les compensations pour les périodes non travaillées (chômage, maternité, maladie...), la pension de réversion pour les veufs et veuves, les majorations pour enfants, le minimum vieillesse… devraient être révélées à cette occasion, mais sans trop dépenser !

L’âge d’équilibre et le bonus-malus

L’âge légal de départ à la retraite sera maintenu à 62 ans, a concédé Macron après une polémique au sein du gouvernement, car cela a peu d’importance puisque le gouvernement envisage d’établir « un âge d’équilibre », ou « âge pivot » afin d’« inciter » les salariéEs à repousser l’âge de départ à la retraite.

Les personnes qui accepteraient de rester au travail au-delà de l’âge pivot bénéficieraient d’une bonification du montant de leur pension, tandis que celles qui partiraient avant cet âge d’équilibre seraient sanctionnées par une minoration de cette prestation. L’âge d’équilibre n’a pas été précisé, mais Édouard Philippe a donné une indication en mettant l’accent dans son discours sur l’âge moyen de départ en Europe, qui est actuellement de 64 ans. Il s’agit, a conclu le Premier ministre, « d’inciter à travailler plus longtemps. Ainsi chacun pourra faire son choix en liberté et en responsabilité ». Un choix fictif pour la majorité de la population, seules les personnes qui ont des revenus importants et qui sont déjà sollicitées pour souscrire à des fonds de pension pourront partir à l’âge légal. Par contre les chômeurEs, les précaires, les petits salaires, les malades, les salariéEs usés par leurs conditions de travail n’auront pas la possibilité de repousser leur départ et toucheront une pension encore plus misérable que leur salaire.

Informer, unifier et préparer la mobilisation dès maintenant !

Macron a annoncé que des mesures pour retarder les départs à la retraite devraient être prises dès 2020, soit cinq ans avant l’application de la contre-réforme aux personnes entrant en retraite.

Le journal Capital annonce que « l’âge d’équilibre pourrait évoluer pour assurer l’équilibre du régime au gré des prévisions économiques […] mais si le gouvernement décide qu’il s’agit d’une mesure d’économie à appliquer rapidement, il pourrait très bien décider de la faire passer plus tôt ». Contre toutes les nuisances sociales en cours et programmées, c’est dès maintenant qu’il faut préparer une stratégie efficace pour contrer ce gouvernement.

S. Bernard