Publié le Vendredi 15 juin 2012 à 09h18.

Retraites : un pas en avant, un pas en arrière, deux pas sur le côté...

Les mesures du gouvernement de retour de la retraite à 60 ans pour les carrières longues sont bien en dessous des revendications des salariéEs.

Un décret gouvernemental édicté avant fin juin pour application au 1er novembre modifiera le dispositif législatif « carrières longues » inscrit dans la loi Sarkozy-Fillon de 2010.

Ces dispositions font suite à l’engagement de Hollande d’élargir les possibilités de départ à la retraite à 60 ans pour ceux qui ont commencé à travailler jeunes et auront cotisé la totalité de leurs annuités. Les conditions d’accès aux mesures « carrières longues » sont assouplies : la majoration de huit trimestres de cotisation imposée par la réforme de 2010 sera supprimée et la condition d’âge de début de carrière professionnelle avancée de deux ans et donc applicable aux personnes ayant commencé à travailler à 18 ou 19 ans au lieu de 17 ans comme précédemment.

Pour les salariéEs ayant connu des « accidents » de carrière, deux trimestres validés au titre des périodes de chômage seront pris en compte dans le calcul du nombre des annuités. Les mères de famille pourront valider deux trimestres de congé maternité, qui s’ajouteront aux quatre trimestres pouvant être validés au titre des arrêts maladie, maternité et accidents du travail dont peuvent bénéficier tous les assurés.

Ces mesures seront applicables aux assurés de l’ensemble des régimes de retraite (salariés du secteur privé, commerçants et artisans, salariés et exploitants agricoles, fonctionnaires, professions libérales) à compter du 1er novembre prochain. Au total ces mesures devraient bénéficier à  plus de 100 000 personnes et leur coût est évalué à 1,1 milliard d’euros en 2013 et 3 milliards en 2017.MesurettesAlors qu’on est en dessous de l’enveloppe de 5 milliards initialement prévue, le gouvernement en reste à des mesurettes qui n’ont rien à voir avec un quelconque « changement maintenant ». Pour les femmes, la prise en compte de l’intégralité des congés maternité est une exigence qui ne coûterait pas très cher. Les départs anticipés concernent en effet très majoritairement des hommes, les femmes qui atteignent 60 ans aujourd’hui ayant souvent interrompu leur carrière pour élever des enfants. Elles ont donc plus de difficultés que les hommes à atteindre 41 annuités et ne représentent que 22 % des 645 000 personnes qui ont pris une retraite anticipée depuis 2004. De même l’accès au dispositif pour les salariés victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle devrait être largement assoupli.

Le financement de ces mesures sera assuré par une augmentation des cotisations sociales « retraite » qui s’établira pour la première année à 0,1 point pour les salariés et 0,1 point pour les employeurs à laquelle s’ajouteront les augmentations de cotisation pour les retraites complémentaires.

À vouloir préserver les « grands équilibres ­», c’est-à-dire l’inégal partage des richesses entre le travail et le capital et le respect des engagements en matière de redressement des finances publiques, le gouvernement renonce à répondre aux exigences portées par les mobilisations de 2010. On est loin d’un retour aux 60 ans pour tous et de la prise en compte réelle de la pénibilité du travail. Syndicats atonesMalgré leur timidité, ces demi-mesures n’ont suscité que peu de critiques. Les organisations syndicales sont restées discrètes, chacune se contente de rappeler les grandes lignes de sa doctrine générale en la matière. La CFDT insiste sur le fait que ces corrections correspondent à ses demandes antérieures et réaffirme son projet de remise en cause complète du système de retraite par répartition par la mise en place d’un système par points et un financement par l’impôt. La CGT et FO, tout en réaffirmant leur soutien au système par répartition, attendent patiemment les prochaines échéances parlementaires. Au total, l’idée que le gouvernement Hollande-­Ayrault fait ce qui est possible dans le contexte de la crise paraît faire son chemin dans les consciences.

Robert Pelletier