Lors de ses vœux télévisés le 31 décembre, François Hollande a continué à exploiter cyniquement le filon démagogique de la situation créée par les monstrueux attentats de janvier et de novembre pour se poser en homme providentiel, en chef d’une France en danger.
Il a ainsi justifié l’intensification des frappes en Syrie et en Irak. « Les coups portent, les djihadistes reculent, s’est-il glorifié, alors nous continuerons autant que nécessaire. » Sauf que Daesh, s’il a reculé en Irak et en Syrie, a étendu ses opérations en Libye et que personne ne peut croire que les milliers de bombes lancées sur ces deux pays tuent les dirigeants et soldats de Daesh sans tuer dix fois ou cent fois plus de civils syriens et irakiens. L’intervention française, comme celles des autres puissances, ne fait qu’ajouter de la destruction et de la mort au chaos qui a permis aux bandes armées de Daesh de prospérer.
Sur les traces de Le Pen
Mais peu importe pour Hollande qui est prêt à tout pour servir, pense-t-il, ses ambitions présidentielles. Et de justifier l’état d’urgence, le renforcement des forces de police et de l’armée ainsi que la décision du gouvernement d’introduire dans la Constitution la déchéance de nationalité pour « les individus condamnés définitivement pour crimes terroristes ». Il a simplement oublié de préciser que les seuls « individus » concernés seraient dans ce cas les binationaux, comme l’avait annoncé Valls le 23 décembre dernier.D’ailleurs Hollande n’a-t-il pas précisé qu’il fallait prendre les « bonnes décisions au-delà des clivages partisans ». Cette mesure, le Front national en a fait depuis longtemps un cheval de bataille et Sarkozy avait promis de la mettre en œuvre ! D’une main, Hollande évoque les odieuses attaques contre les « lieux de prière » ou les « mosquées », comme celles qu’ont perpétrées des voyous d’extrême droite en Corse. De l’autre, il joue la partition du Front national, il cherche à semer le poison de la division par cette mesure qui crée deux catégories de citoyens français, instaurant une citoyenneté de seconde zone, celle des binationaux.Mais cela ne l’empêche pas de prétendre vouloir mettre en œuvre un « état d’urgence économique et social ». « La lutte contre le chômage reste ma première priorité », a-t-il eu le culot d’affirmer. Personne ne peut être dupe. Hollande a déclaré qu’il ne se représenterait que si la courbe du chômage s’inversait. Qu’à cela ne tienne, il va faire en sorte qu’il y ait moins de chômeurs... sur le papier grâce à un « plan massif de formation » concernant 500 000 personnes. Pour le reste, ce sont toujours les mêmes prétendus remèdes : « simplifier le code du travail », c’est-à-dire abattre les législations sociales qui limitent l’arbitraire patronal et de « nouvelles aides à l’embauche », des milliards de cadeaux supplémentaires qui augmentent les profits des grandes entreprises et les dividendes de leurs actionnaires sans créer un seul emploi.
Sans patrie ni frontières
Hollande croit pouvoir faire accepter l’offensive que son gouvernement mène contre les travailleurs pour le compte du patronat et des plus riches en prônant, à la faveur de l’émotion qu’ont créée les attentats, une unité nationale qui n’est qu’un piège pour les exploités. Il s’agit en effet de faire croire à une communauté d’intérêts entre l’ensemble de la population, les travailleurs, qui ont de plus en plus de mal à vivre décemment et la mince couche d’ultra-privilégiés qui accaparent par leur mainmise sur l’économie de plus en plus de richesses. « La patrie, a-t-il conclu, c’est le fil invisible qui nous relie tous, Français d’ici ou d’ailleurs, citoyens de toutes conditions, de toutes croyances et de toutes origines. » Comme si le fossé entre les classes possédantes et le monde du travail n’existait pas.Mensonge d’autant plus cynique quand Hollande vient de confirmer la déchéance de la nationalité, quand on connaît également les conditions indignes, scandaleuses, qui sont faites aux migrants, aux Roms, et plus généralement, à tous les pauvres.« Prolétaires de tous les pays, unissons-nous », cette devise du mouvement ouvrier à l’époque de Marx est d’une brûlante actualité. Les seules frontières qui existent sont les frontières de classe, celles qui séparent toutes celles et ceux qui ne peuvent vivre que de leur travail et l’infime minorité de la population qui s’enrichit de leur exploitation.
Nos souhaits pour 2016, c’est que l’ensemble du monde du travail puisse rassembler ses forces pour la défense de ses intérêts et ceux de toute la société contre la régression qu’entraîne cette politique.
Galia Trépère