Pendant très longtemps, l’opinion publique italienne a été favorable à l’Union européenne. C’est à une vaste majorité que le Parlement italien a voté l’adoption de l’euro. À l’époque, Rifondazione comunista avait également soutenu ce choix.
De par l’administration de doses de plus en plus importantes d’austérité, justifiées par le fait qu’il fallait répondre aux exigences de la Commission européenne et rester dans le cadre de l’euro (la formule d’usage était « l’Europe nous le demande »), l’adhésion populaire s’est progressivement effritée dans certains secteurs du monde du travail et au sein des couches les plus pauvres de la société. Dans des secteurs significatifs de la population de même que chez les jeunes, l’idée que le processus d’unification du continent est juste et nécessaire continue à être forte. De nombreux mouvements et associations aspirent à un changement démocratique et social de l’UE, tout en en critiquant les politiques libérales actuelles.
Les trois grandes centrales syndicales italiennes ont soutenu l’ensemble des choix européens. Elles ont validé les politiques d’austérité, et n’ont jamais exigé que des correctifs sociaux sans lancer d’appels à la lutte pour les mettre en œuvre.
Les secteurs fondamentaux de la bourgeoisie italienne soutiennent le processus d’unification capitaliste actuel et en sont partie prenante. Ce n’est pas un hasard, d’ailleurs, si l’actuel président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, est un italien.
Les gouvernements dits techniques, tout comme les gouvernements de centre-gauche qui se sont succédé au pouvoir, ont eu la même position et ont été les responsables directs de la mise en application des choix libéraux de l’UE.
Dernièrement, un personnage comme Renzi, l’ancien Premier ministre [de centre-gauche entre février 2014 et décembre 2015 NDT], de même que de nombreux ministres de l’actuel gouvernement Gentiloni se sont essayés à de vagues critiques vis-à-vis des politiques austéritaires, soutenant la nécessité de passer à une phase expansive de l’économie. Néanmoins, ces ministres continuent à opérer dans le cadre étroit du Pacte budgétaire européen. En effet, le Parti démocrate et ses alliés sont les principaux soutiens du projet capitaliste de l’UE.
Contre les réacs à l’offensive, répondre par l’internationalisme
Le parti de Berlusconi, Forza Italia, a été partie prenante de ce processus, même si parfois pour des raisons tactiques, ce dernier a essayé de critiquer certaines orientations. Berlusconi a vaguement évoqué la possibilité d’introduire un système de deux devises pour acquérir à nouveau une souveraineté monétaire, mais il s’agit d’une posture tactique visant à reconstituer l’unité des différentes composantes de la droite italienne.
Car les courants d’extrême droite sont favorables à une sortie de l’euro et à une reconquête de la souveraineté nationale. C’est le cas de Fratelli d’Italia-Alleanza nazionale, aux racines fascistes prononcées, ou encore du Pôle souverainiste qui est en train de voir le jour. Néanmoins, le courant le plus actif et le plus dangereux sur ce terrain, qui maintient des rapports étroits avec le FN français, n’est autre que la Ligue du Nord. Ce parti a, aujourd’hui, une projection nationale, se bat pour la sortie de l’euro et mène une campagne très agressive et réactionnaire de haine à l’égard des migrantEs au sein de vastes couches de la population. La Ligue du Nord réclame également le « droit » des citoyens à se faire justice eux-mêmes, y compris par les armes...
À gauche et au sein du monde associatif lié aux sociaux-démocrates, ce sont des positions euroréformistes qui prévalent, accompagnées du slogan « Notre Europe doit être unie, démocratique et solidaire ». Rifondazione a affirmé la nécessité de désobéir aux traités européens mais soutient, en dernière instance, les choix opérés par le gouvernement Tsipras.
Le comité « Eurostop », un cartel composé de différentes forces, défend à l’inverse une position souverainiste de gauche et soutient la perspective de l’Italexit, à savoir la sortie de l’Italie de l’euro.
Sinistra Anticapitalista, tout comme d’autres forces politiques et sociales, défend une position de classe et internationaliste : il nous faut développer le combat contre le patronat italien, en cherchant à construire l’unité au-delà des frontières à travers la mobilisation de l’ensemble des exploitéEs, au côté des migrantEs, pour construire un projet anticapitaliste alternatif à échelle italienne et européenne.
De Rome, Franco Turigliatto
(Traduction CT)