Publié le Mercredi 11 septembre 2019 à 13h35.

Le cheval de Troie des retraites complémentaires

Le fonctionnement des retraites complémentaires a largement inspiré le projet de réforme présenté par Macron-­Delevoye. Ces régimes complémentaires ont été créés dès 1947 afin de pallier l’insuffisance des pensions servies par le régime général et sont devenus obligatoires à partir de 1972.

Une gestion « exemplaire »

À l’identique du régime de base, les régimes complémentaires sont gérés en répartition et leur gestion est donc affectée par les évolutions démographiques et les contraintes du système économique.

La particularité des régimes complémentaires est qu’ils sont basés sur un système par points et non sur la base d’un nombre variable d’annuités travaillées ou compensées. Chaque mois, les employeurs versent des cotisations aux caisses complémentaires. Lorsque l’affiliéE liquide sa retraite, les points acquis durant sa carrière sont transformés en pension. Le prix d’acquisition des points et leur valeur au moment du paiement de la pension complémentaire sont fixés par les « partenaires sociaux » soucieux de l’équilibre des caisses dont ils assurent la gestion.

La place des complémentaires est souvent très importante pour les retraitéEs. Elles contribuent pour moitié à la pension des cadres, pour un tiers à celle des salariéEs.

La gestion paritaire de ces caisses a « fait ses preuves ». Entre 2012 et 2017, le pouvoir d’achat des pensions des régimes de base a très légèrement diminué, de 0,1 % en moyenne par an. Mais sur la partie complémentaire, le pouvoir d’achat des pensions des principales complémentaires, Agirc (Association générale des institutions de retraite des cadres) et Arrco ((Association des régimes de retraite complémentaire des salariés) aujourd’hui fusionnés) a respectivement diminué de 0,4 % et 0,3 % par an.

Certains régimes complémentaires ont constitué des réserves financières : 70 milliards d’euros pour l’Agirc-­Arrco, 24 milliards pour les professions libérales (CNAVPL), 17 milliards pour les indépendantEs (RCI), 8,5 milliards pour les contractuelLEs de la fonction publique (Ircantec)… Soit, à fin 2017, un pactole de 137 milliards d’euros. Sur lequel le gouvernement compte bien faire main basse, ce qui explique en partie le mécontentement de certaines professions.

La privatisation en vue

En plus des régimes obligatoires par répartition, des retraites supplémentaires, dite aussi « sur-complémentaires », permettent à certainEs retraitéEs de compléter leurs revenus. Ces dispositifs fonctionnent le plus souvent par capitalisation et sont majoritairement gérés par des sociétés d’assurances. Leur place dans l’ensemble des régimes de retraite demeure marginale. En 2017, leurs cotisations ne représentaient que moins de 5 % de l’ensemble des cotisations et le nombre d’adhérentEs atteignait 13,1 millions avec de faibles prestations, de l’ordre de 2 %. C’est un des objectifs de la loi Pacte de rendre les produits d’épargne retraite plus simples, attractifs. Selon Bruno Le Maire, « cette simplicité et liberté doivent permettre de faire décoller l’épargne retraite en France ».

Une liberté qui, comme celle de l’âge de départ à la retraite, n’est qu’un leurre dont ne peuvent s’affranchir la majorité des salariéEs, tout en ouvrant la voie à l’extension de la ­privatisation de l’ensemble du système.