Le 7 décembre 2023, Macron a annoncé sa vision pour l’Enseignement supérieur et la recherche (ESR) d’ici à la fin de son mandat. Dans la continuité des lois qu’a subies l’ESR au cours des dernières décennies, de l’autonomie à la loi de programmation de la recherche (LPR), le projet macronien peut être résumé à partir de trois grands axes : détruire tout cadre national, poursuivre l’autonomie des universités et ouvrir à la privatisation.
Ceux-ci correspondent aux trois orientations annoncées : supprimer le statut pour les personnels afin de permettre des embauches locales et précaires ; contrôler la recherche par le pilotage, notamment à travers la transformation des organismes nationaux de la recherche (CNRS, Inserm, etc.) et enfin réduire les budgets des universités qui devront se caler sur le modèle anglo-saxon de l’investissement privé. Ces annonces se font par ailleurs parallèlement à la labellisation de l’enseignement supérieur privé par le ministère, permettant à de grands groupes capitalistes de profiter de ce marché lucratif encore trop peu exploité.
Ces objectifs s’articulent autour d’une seule volonté : accentuer la compétition entre les établissements supérieurs et gagner des places dans les classements internationaux comme ceux de Shanghai dont les indicateurs de la qualité des universités et de la recherche sont fortement questionnés. Tout cela aux dépens des personnels, des étudiantEs et au final de l’avenir du service public de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Le « Conseil scientifique présidentiel », un instrument pour gouverner ?
Alors que les organismes publics de la recherche existants sont ignorés, Macron a aussi annoncé la création du Conseil présidentiel de la science, un nouvel organisme pas très bien défini qui devrait aider le président dans sa prise de décision. Du « Grand Débat » lors de la mobilisation des Gilets jaunes au Conseil scientifique du Covid-19 en passant par la Convention citoyenne pour le climat, les propositions d’ouverture démocratique de Macron ont toujours constitué un simulacre de participation. Le but est de désamorcer la critique tout en essayant de construire des stratégies de légitimation de sa politique de destruction du commun.
De fait, l’approche de la recherche par Macron, comme le reste de sa politique, est fondée sur une vision autoritaire et dénie toute dimension démocratique : si les étudiantEs, les personnels ou les syndicats sont contre, c’est parce qu’iels n’ont pas compris. Il ne sert donc à rien de discuter, il faut à Macron des structures dociles et consensuelles qui appliquent sa vision du monde et de la recherche scientifique. Comme tout autre domaine du social, celle-ci est subordonnée aux logiques de la concurrence et de la rentabilité économique. Son conseil permettra d’outiller la prise de décision présidentielle par le biais du recours à l’expertise. Exit les syndicats de personnels, exit les académies des sciences, Macron va faire place nette si nous ne nous organisons pas pour l’arrêter !
ÉtudiantEs étrangerEs discriminéEs
L’attaque contre les universités comporte aussi son volet dans la récente loi raciste sur l’immigration. L’internationalisation et l’« attractivité » des universités sont en effet indissociables de la doctrine de la sélection adossée à celle de l’immigration choisie. Versement d’une « caution de retour » pour obtenir un visa, contrôle accru et retrait possible du visa étudiant, instauration de quotas…. Ces mesures viennent s’ajouter à l’augmentation des frais de scolarité datant de 2019 et appliquée aux étudiantEs hors UE qui doivent débourser plusieurs milliers d’euros contre quelques centaines pour les étudiantEs issuEs de l’UE. Cette loi précarisera aussi encore plus les salariéEs étrangerEs des universités et organismes de recherche.
Nous revendiquons la suppression de cette « caution de retour » et la gratuité des frais de scolarité pour toutEs.
L’élan vital des mobilisations étudiantes
Malgré la chape de plomb jetée sur les universités avec les contre-réformes, le nouveau maccarthysme contre les « islamogauchistes » et l’actuelle répression de la solidarité envers le peuple palestinien, la mobilisation de la jeunesse étudiante essaie de se frayer un chemin. Des comités Palestine voient le jour dans plusieurs facs en proposant des moments de débat, de formation et d’élaboration. Ces initiatives sont vitales car elles renouent avec la vocation émancipatrice et critique de la science et de l’université.