Les dernières mesures de Sarkozy concernant l’automobile sont dérisoires et n’auront aucun effet sur la crise.
Rien pour les salaires, rien contre les licenciements et le chômage partiel : voilà ce qui a été largement compris du plan de Sarkozy. Au-delà des effets d’annonce, il s’agit, pour l’industrie automobile, d’un petit bricolage qui ne répond en rien aux problèmes posés par une crise historique. Les lendemains sont malheureusement prévisibles, les fermetures d’usine et les suppressions d’emplois continueront. « Si les marchés continuent à l’allure à laquelle ils sont en train de baisser, nous serons amenés à faire des coupes de production supplémentaires », a averti le patron de Renault, Carlos Ghosn, en guise de réponse au discours de Sarkozy.
L’annonce la plus médiatisée a été celle de la prime à la casse de 1000 euros. Du réchauffé : c’est une reprise à moindre échelle de mesures déjà appliquées par Balladur et Juppé, en 1993 et 1995. Il y aura peut-être un gonflement momentané des ventes, qui sera suivi d’une baisse approximativement du même niveau. Cette prime aura encore moins d’impact que les précédentes. Son montant est inférieur à celle de Juppé qui était, il y a treize ans, l’équivalent de 1 300 euros actuels. Aujourd’hui, avec les pressions sur les salaires et le crédit, des rabais proposés de plusieurs milliers d’euros ne permettent même pas d’augmenter les ventes de voitures. L’aubaine de 1000 euros pour quelques-uns n’aura donc qu’un effet très limité. Enfin et surtout, la crise, selon l’avis de tous, est bien plus sérieuse qu’il y a quinze ans, combinant un choc de conjoncture avec un changement de période dans l’histoire de l’industrie automobile.
La pollution automobile est, bien sûr, un problème réel. Avec la dégradation fréquente des transports publics, la grande majorité utilise par nécessité des véhicules d’occasion qui polluent davantage. Mais ils ne sont pas concernés par cette prime. En dix ans, le nombre de voitures âgées de onze à quinze ans est passé de 8 à 9,5 millions. S’en prendre réellement à la pollution automobile exigerait des mesures d’une tout autre ampleur.
Sarkozy a aussi annoncé la création d’un fonds d’investissement pour « la consolidation de la sous-traitance automobile » en France. Des fonds publics seront mis à disposition de PSA et Renault, associés à Valéo et Faurécia. Ces derniers n’ont cessé d’abandonner des activités à des sous-traitants de second rang, avec des patrons voyous, comme Molex à Villemur-sur-Tarn (Haute-Garonne). Dans ce Far West, PSA et Renault vont jouer les shérifs.
Faisons les comptes : 220 millions d’euros pour la prime à la casse, 100 millions d’euros pour la sous-traitance automobile, et 1 milliard d’euros accordé aux filiales bancaires des constructeurs. Mais avec plus de deux milliards d’euros de dividendes pour le seul exercice 2008, les actionnaires de Renault et PSA recevront davantage. Ils auraient donc pu et dû payer. Pour l’innovation dans le secteur, et alors que la crise fait rage, Sarkozy n’a ajouté aucune mesure nouvelle à celles déjà annoncées le 9 octobre dernier. Panne d’imagination ? Non, acceptation de la crise.
Un débat commence à traverser la bourgeoisie : les capitaux ne doivent-ils pas être investis dans d’autres branches d’activité plus rentables que l’automobile, et peut-on laisser à « la main invisible du marché » le soin de choisir ? Aux États-Unis, les laborieuses négociations avec les trois grands constructeurs traduisent ce débat. Sur un mode plus discret, il existe aussi en France. Patrick Devedjian, dans l’une de ses dernières interventions de secrétaire général de l’UMP, avant d’être bombardé ministre, a déclaré : « On s’aperçoit qu’il y a très naturellement un grand nombre de voitures qui vont à la casse chaque année, et qui bénéficieraient dans ce cas-là évidemment d’une prime inutile. » C’est bien le signe de doutes quant à la meilleure politique pour le capital.
Impératifs de rentabilité
Conséquence des restructurations, PSA et Renault, parmi les dix premiers du monde, n’emploient en France qu’une part minoritaire des salariés de l’industrie automobile. Les firmes multinationales de l’équipement automobile, elles aussi championnes du monde de leur catégorie, ainsi que les sous-traitants de second rang, sont parmi les entreprises qui délocalisent et licencient le plus.
La crise est toujours là, dans toute la branche automobile. La coordination des réponses nécessaires doit être le fait des ouvriers et des salariés de toute la branche. L’urgence est bien à une riposte, tous ensemble et coordonnée, pour obtenir, dans toute la branche automobile, le paiement intégral des jours chômés, l’arrêt des licenciements et des fermetures d’usine. Les solutions pour garantir l’emploi, satisfaire les besoins sociaux et préserver l’environnement sont incompatibles avec les impératifs de la propriété privée et de la rentabilité financière. Les mesures annoncées par Sarkozy en apportent une démonstration supplémentaire.