Ce jour-là, la SNCF a connu sa plus grosse journée de grève depuis 10 ans...
L’appel initial émanait des fédérations CGT-SUD-UNSA-CFDT, dans le but de faire pression sur les négociations d’une convention collective dont personne ne sait où elles en sont. Mais la publication le
18 février des projets de loi El Khomri et d’un décret-socle pour les cheminotEs, a fait monter d’un cran la colère qui s’est propagée comme une traînée de poudre. Et donc le 9 mars, plus de 60 % des cheminotEs étaient en grève (cadres compris), avec des pointes à 80 ou 90 % dans de nombreux services d’exécution.
La motivation était donc double : lutter contre la destruction du code du travail et de son équivalent pour les cheminotEs (le remplacement du « RH 077 » par un décret-socle au rabais). D’autant que ces nouveaux projets scélérats s’additionnaient aux réorganisations permanentes, aux milliers de suppressions de postes, à la dégradation des conditions de travail, aux salaires de misère... Donc une grosse colère accumulée. Et une journée des plus réussies, vécue comme une étape vers un mouvement de grève reconductible.
Beaucoup de cheminotEs ont conscience de vivre une période-charnière dans les prochaines semaines : à des attaques d’un tel niveau, rarement atteint, il faut une riposte à la hauteur, c’est-à-dire une grève du calibre de celle de 1995 ! Ou mieux même, une vraie grève générale puisque la loi El Khomri touche de plein fouet toutes les catégories professionnelles, et que même des étudiantEs et lycéenEs ont commencé sérieusement à s’y mettre. C’est ce qui explique la volonté de nombreux cheminotEs de se réunir en assemblées générales le 9 mars, chose très inhabituelle pour une grève de 24 heures. Ces AG ont aussi démontré une certaine accumulation d’expérience, car la grève de 2014 a laissé des traces positives : des réflexes de combativité et d’auto-organisation dans certains secteurs d’une valeur inestimable pour ces prochaines semaines.
Vers la reconduction ?
Mais ce qui s’est exprimé dans ces AG, c’est précisément la volonté d’éviter l’isolement de la grève de 2014, et de s’insérer dans un mouvement de travailleurs plus large,et de la jeunesse, contre la loi Travail et contre toute la politique du gouvernement. L’expression concrète de cette envie de convergence, c’est la volonté de partir en grève reconductible à partir du 31 mars, en prenant appui sur le mouvement étudiant et la journée de grève interprofessionnelle.
Problème : les directions syndicales semblent avoir d’autres projets. Avant la parution de la loi Travail et du décret-socle, la direction de la CGT cheminots avait prévu son petit planning d’une journée en avril, puis une en mai, pour aboutir tranquillement à une grève reconductible en juin. C’est pourquoi elle freine aujourd’hui des quatre fers pour que ce plan ne soit pas bousculé par la jeunesse et la dynamique actuelle contre la loi Travail... Du côté de SUD-Rail, sortait fin février un tract titré « Contrôlons les négociations »… à ce jour, la direction de SUD-Rail n’ose pas envisager de « casser l’unité » avec la direction de la CGT. Une grève reconductible à partir du 31 est bel et bien dans les têtes des cheminotEs, mais les cerveaux fédéraux semblent plus lents, et prêts à l’évacuer !
Les prochaines semaines vont donc être décisives : soit les bureaucraties syndicales arrivent à repousser à plus tard un affrontement, pourtant inévitable, pour ne pas gêner davantage qu’il ne l’est le gouvernement, soit la dynamique du mouvement étudiant et la combativité et l’organisation chez les salariéEs, en particulier à la base chez les cheminotEs, arrivent à franchir l’obstacle. On peut espérer que le chemin vers la grève générale empruntera aussi la voie ferroviaire !
Le secteur cheminot du NPA