Publié le Mercredi 27 octobre 2021 à 09h25.

Aux États-Unis, l’offensive des Républicains entraîne de la violence dans les conseils scolaires

Au cours des trois derniers mois, les réunions des conseils scolaires locaux aux États-Unis sont devenues le théâtre d’intenses discussions, voire de violences, alors que les parents s’opposent – parfois à coups de poing – à la fois sur les politiques de santé et sur l’enseignement des questions raciales.

Cette vague d’affrontements a commencé à l’ouverture des écoles, fin août-début septembre, alors que les parents de droite se mobilisaient contre les vaccins obligatoires, les masques obligatoires et l’enseignement de la théorie critique de la race. Dans certains cas, la police a dû être appelée pour rétablir l’ordre. Fin septembre, la National School Boards Association (association nationale des conseils d’école) a demandé au président Biden d’intervenir pour protéger les membres des conseils scolaires, et le Procureur général (ministre de la Justice) a déclaré qu’il ferait appel au FBI et à d’autres agences gouvernementales pour prévenir la violence.

La droite à l’offensive

Là où les gouverneurs républicains ont pris des arrêtés interdisant le port du masque, des parents progressistes se sont rendus aux réunions des conseils scolaires pour plaider en faveur de la vaccination, du port du masque ou, dans d’autres cas, du maintien de l’éducation sur la race et le racisme dans les programmes scolaires. Les Républicains et les personnes d’extrême droite — qui sont responsables de la plupart des violences – s’y opposent et utilisent les réunions pour promouvoir un programme de droite et pour se mobiliser en vue des prochaines élections nationales de novembre 2022, lorsque 34 sièges du Sénat et les 435 sièges de la Chambre des représentants seront à renouveler. Les militants de droite, qui se comportent souvent de manière séditieuse, crient et perturbent les réunions, créent le chaos et certains parents en viennent aux mains.

Dans le passé, les réunions des conseils scolaires étaient généralement plutôt calmes. Les États-Unis ne disposent pas d’un système éducatif national ; chacun des 50 États est responsable de ses propres politiques éducatives. Au sein de ces États, quelque 13 800 conseils scolaires locaux mettent en œuvre les politiques de l’État, administrent les écoles et disposent d’un grand pouvoir vis-à-vis des enseignantEs et des élèves. La plupart des conseils scolaires sont dominés par les entreprises locales, avec des membres issus d’une grande entreprise ayant son siège dans la ville, un propriétaire de petite entreprise, un dentiste ou un avocat local, et parfois les syndicats d’enseignantEs présentent ou soutiennent des candidatEs. Dans ce contexte, les réunions des conseils scolaires ont toujours été assez sereines, les membres du conseil, les enseignantEs et les parents débattant des questions financières et d’orientation importantes.

Champs de bataille

Aujourd’hui, les conseils scolaires sont des champs de bataille. Les Centres de contrôle des maladies (CDC) ont recommandé que les masques soient portés par les enseignants, le personnel et les élèves dans toutes les écoles. Mais des gouverneurs républicains, comme Greg Abbott au Texas et Ron DeSantis en Floride, ont pris des arrêtés interdisant aux districts scolaires d’imposer le port du masque. L’argument républicain est que les parents devraient avoir la liberté de décider s’ils veulent ou non que leurs enfants soient vaccinés ou portent un masque. Certains des parents républicains sont également des partisans de Q-Anon, qui pensent que les Démocrates, l’État profond et les élites mondiales sont des pédophiles sataniques dont le soutien au vaccin contre le Covid est un complot diabolique afin d’empoisonner le peuple américain. D’autres croient que le fondateur de Microsoft et milliardaire Bill Gates a mis des micropuces dans le vaccin pour contrôler le comportement des gens. Q-Anon a appelé les Républicains à prendre le contrôle des commissions scolaires locales dans le cadre d’une stratégie politique plus large visant à combattre les « satanistes ».

Les Républicains ont également mobilisé les parents blancs pour demander que l’on interdise aux enseignants d’enseigner la théorie critique de la race (une analyse du racisme structurel) ou d’enseigner tout simplement la race, en faisant valoir que les enseignantEs accusent tous les Blancs d’être racistes. Huit États ont déjà interdit l’enseignement de la théorie critique de la race, tandis qu’une douzaine d’autres législatures d’État envisagent une telle interdiction. De nombreux parents noirs et progressistes affirment au contraire que l’enseignement de l’histoire de la race et du racisme, ainsi que du rôle du racisme structurel dans la société, est une partie essentielle de l’éducation.

Les batailles au sein des commissions scolaires pourraient jouer un rôle important dans les élections au Congrès de 2022 et, au-delà, dans la perspective d’un possible retour de Donald Trump à la présidence en 2024.

Traduction Henri Wilno