L’ancien président Donald J. Trump a été inculpé et le Parti républicain et ses partisans de droite se rallient à lui. Cet événement nous fait entrer dans une nouvelle phase qui sera marquée par des inculpations, des luttes politiques au Congrès et peut-être des bouleversements importants. L’enjeu est l’avenir du Parti républicain et de l’extrême droite américaine. Mais aussi de la démocratie étatsusienne — qui a par ailleurs des limites importantes.
Le 30 mars, un grand jury de Manhattan (New York) a inculpé Donald Trump de 30 chefs d’accusation de fraude commerciale et de violation des lois électorales dans le cadre du versement de 130 000 dollars de pots-de-vin à la star du cinéma pornographique Stormy Daniels avant son élection en 2016. Il s’agit de la première inculpation d’un président étatsunien en exercice ou d’un ancien président et elle aura de graves répercussions politiques.
Le début d’une longue série
Le procureur de Manhattan, Alvin Bragg, un démocrate, a mené l’enquête et porté l’affaire devant le grand jury. Les charges spécifiques seront révélées le 5 avril (cet article est rédigé le 2 avril) lorsque les avocats de M. Trump déclareront qu’il se rendra à la convocation de la police. Il sera photographié, ses empreintes digitales seront relevées, ses droits lui seront lus et il pourrait être menotté.
Cette inculpation n’est que l’un des nombreux et graves problèmes juridiques auxquels est confronté Donald Trump. Il doit encore répondre d’une tentative d’annulation illégale de sa défaite électorale en Géorgie, de son rôle dans la provocation de l’insurrection du 6 janvier 2021 au Capitole des États-Unis, de la soustraction illégale de documents gouvernementaux et d’obstruction à la justice, ainsi que d’autres chefs d’inculpation. Cette inculpation encouragera certainement d’autres procureurs à engager des poursuites contre Trump, qui n’ont que trop tardé.
Trump affirme qu’il est « l’homme le plus innocent de l’histoire du pays » et que les accusations portées contre lui sont le résultat d’une « chasse aux sorcières » menée par des « Démocrates radicaux de gauche » et constituent une « ingérence flagrante dans les élections ». Dans son style démagogique typique, il a qualifié le procureur Bragg, qui est noir, d’« animal soutenu par Soros ». Traiter les noirs d’« animaux » est un vieux trope raciste et alléguer que Bragg agit au nom de l’homme d’affaires juif George Soros est un argument antisémite classique.
Trump pourrait être candidat
Donald Trump, qui a lancé sa campagne pour l’investiture républicaine en vue de l’élection présidentielle de 2024, reste le favori du Parti républicain, soutenu aujourd’hui selon les sondages par 51 % des Républicains, dix points devant son rival, le gouverneur de Floride Ron DeSanti, malgré l’inculpation. Mais 61 % des ÉtatsunienEs déclarent ne pas vouloir que Trump redevienne président. Même s’il est inculpé et condamné, Trump pourrait se présenter à l’élection présidentielle et, s’il l’emporte, prendre ses fonctions.
En 1920, le candidat du Parti socialiste Eugene V. Debs, qui avait été condamné à la prison pour violation de la loi sur l’espionnage de 1917 en raison d’un discours anti-guerre qu’il avait prononcé et qui, selon le gouvernement, découragerait l’enrôlement dans l’armée, s’était présenté à l’élection présidentielle avec un macaron portant l’inscription « For President Convict No. 9653 » (Pour être président, condamné n° 9 653). Il avait obtenu un million de voix cette année-là.
« Lorsque Trump gagnera, ces gens-là paieront ! »
Les Démocrates ont soutenu l’acte d’accusation comme étant fondé sur la loi et les faits et appelé le public à rester calme. Le Parti républicain s’est une fois de plus rallié à Trump, effrayé par l’énorme pouvoir qu’il exerce sur sa base. Le chef de la majorité républicaine à la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, l’ancienne ambassadrice de Trump à l’ONU, Nikki Haley, le député Jim Jordan et la députée de droite Marjorie Taylor Greene se sont empressés de le défendre. Le député républicain du Texas Ronny Jackson, ancien médecin personnel de M. Trump, a déclaré : « Ces Démocrates lâches détestent M. Trump et détestent encore plus ses électeurs », a-t-il écrit. « Lorsque Trump gagnera, ces gens-là paieront ! »
Avant la décision du grand jury, Trump a mis en garde contre « la mort et la destruction potentielles » s’il était inculpé et les plateformes médiatiques d’extrême droite, telles que The Donald et 4chan, ont depuis posté des attaques racistes et violentes contre Bragg et appelé à la « guerre », à la « guerre civile », aux « assassinats », au « terrorisme » et au « chaos ». Des menaces de mort ont été proférées à l’encontre de Bragg, du procureur général des États-Unis Merrick Garland et de Stormy Daniels. Cependant, jusqu’à présent, il n’y a pas eu de violence de la part de l’extrême droite et les manifestations pro-Trump à New York ont été dépassées par le nombre de ceux qui détestent Trump et ce qu’il représente.
Traduction HW