La révolte et la répression au Bahreïn ne sont pas un sujet très médiatisé en France depuis que la première révolte dans ce royaume liée au Printemps arabe (celle de février/mars 2011) a été écrasée à partir du 14 mars dernier. Et pourtant, il se passe énormément de choses dans ce pays du Golfe arabo-persique d’un peu plus d’un million d’habitantEs, qui avait été l’épicentre des mouvements de révolte dans la région du Golfe, l’année dernière. Les manifestations, émeutes et heurts avec les forces de l’ordre étaient presque quotidiens, au cours des dernières semaines. Tout autant que les mauvaises nouvelles liées à la répression, aux prisonniers politiques, à la torture, aux alertes d’organisations de défense des droits humains.
Le 12 janvier, des heurts ont opposé des forces de sécurité du régime à des manifestantEs appelant à la chute de la monarchie, dans les environs de la capitale Manama. Notamment dans les villes de Diraz, Sitra et Saar, à dominante chiite. Le 13 janvier, on a appris l’hospitalisation d’urgence du militant Nabeel Rajab, après avoir été agressé par la police. Des représentants de l’ambassade des États-Unis, qui a mis la monarchie du Bahreïn sous pression afin qu’elle lâche du lest, ont rencontré ce militant du mouvement de protestation et exprimé leur « inquiétude » sur le comportement des forces du régime. Le lendemain 14 janvier, la mort du jeune Yousif Ahmed Awali a été rendue publique. Il avait auparavant « disparu » entre les mains de la police, mais celle-ci annonça avoir « retrouvé son corps » après trois jours de recherche. Sa famille a expliqué que le jeune homme, âgé de 24 ans, était mort sous la torture.
Le 15 janvier, le roi Hamad Ben Issa Al-Khalifa a rendu publique une « réforme constitutionnelle », qui restera cependant très limitée. Elle élargit les pouvoirs du Conseil législatif qui a pour tâche de conseiller le roi, mais n’est pas un vrai parlement, les partis politiques étant en principe interdits dans ce royaume (bien qu’existant sous forme de « blocs » de députés). Matar Matar, porte-parole du principal mouvement d’opposition chiite – du bloc Wefaq – a déclaré que cette réforme était « marginale ». Le même jour, on apprit la mort par immolation d’une femme âgée de 59 ans, Badriya Ali, qui était en état de dépression depuis l’arrestation et la torture de son fils Ahmed Mushaima – âgé de 25 ans – en avril 2011. Une femme de 81 ans nommée Salma Mohsin est morte le même jour, asphyxiée par le gaz lacrymogène de la police dont une cartouche avait atterri dans sa maison. Cette nouvelle déclencha, le lendemain, des sévères émeutes dans son village, Barbar.
Le 24 janvier, des heurts avec les forces de l’ordre se sont déroulés dans plusieurs municipalités chiites. 41 policiers et plusieurs manifestanEts (dont le nombre n’est pas connu avec précision) ont été blessés, notamment à Duraz, Sanabis, Daïr et Al-Ekr. La police anti-émeutes a été attaquée avec des pierres et des cocktails molotov. Le 25 janvier, quatre protestataires ont trouvé la mort.
Par ailleurs, depuis le 30 janvier a commencé le procès en appel de plusieurs dizaines de médecins et infirmières, accuséEs par le régime d’avoir soigné des manifestants blessés (et d’avoir « exagéré leurs blessures pour les médias internationaux ») et lourdement condamnés l’année dernière. Les organisations des droits de l’homme suivent la situation du pays avec beaucoup d’inquiétude.
Bertold du Ryon