Réunis sous la dénomination « Comité stratégique indépendantiste de non-participation », les représentantEs des partis politiques (FLNKS, les nationalistes du MNSK, PT, DUS, MOI) et les structures syndicales indépendantistes (USTKE, FLS, CNTP) appellent à la non-participation au référendum du 12 décembre, maintenu à marche forcée par les autorités françaises. Nous publions des extraits de leur déclaration commune.
Nous, les participants du camp du Oui, souhaitons que cette ultime consultation de l’Accord de Nouméa se déroule dans un climat serein et apaisé ; tout le monde peut se rendre compte que ce ne sera pas le cas. Depuis le 6 septembre 2021, notre pays a été durement éprouvé par la crise sanitaire. Le bilan ne cesse de s’alourdir et l’heure est à la compassion et aux condoléances pour les familles. Le Covid-19 a créé un climat anxiogène, la population est divisée sur l’obligation vaccinale et le pass sanitaire, aussi bien chez les partisans du Oui que ceux du Non, en plus de son impact dans le monde du travail, des secteurs sensibles à ceux impactés par la réduction de leur chiffre d’affaires. […]
Une consultation biaisée
La déclaration finale de la table ronde de Nainville-les-Roches du 12 juillet 1983 a ouvert une période longue de 38 ans dans laquelle le peuple kanak a décidé de partager son droit à l’autodétermination avec les autres ethnies présentes en Nouvelle-Calédonie. Nous avons invité les victimes de l’histoire coloniale, qui n’ont plus d’autres Pays à être une partie de nous, au travers de trois consultations et par la citoyenneté calédonienne. Cette citoyenneté ouverte aux autres fournit également aux citoyens et aux communautés non-kanak une garantie politique d’égalité de traitement et d’inclusion dans le destin commun. Elle sécurise l’avenir des populations concernées. Elle est la matrice du peuple légitimé de ce Pays. Y aurait-il une marche forcée pour la destruction de ce vivre ensemble ?
Nous refusons d’être enfermés, comme l’État français cherche à nous y contraindre, dans un choix entre une indépendance solitaire de rupture et un nouveau statut dans la France avec l’élargissement du corps électoral spécifique aux citoyens de ce Pays. Le document de l’État sur les conséquences du Oui et du Non ne fait pas consensus. Il a été jugé comme « n’étant ni plus ni moins qu’un manifeste de propagande pour le Non » par le 39e congrès du FLNKS le 21 août à Nouméa, et par les autres mouvances indépendantistes. […]
Une décision irrévocable de non-participation
Le ministre des Outre-mer limite ses arguments à une situation sanitaire qui serait devenue acceptable, sans aucunement se poser la question du climat social. Dans tous les pays, la santé et le social vont de pair, jamais l’un sans l’autre. Il conviendrait plutôt de travailler sur les conditions d’organisation de nouvelles modalités de campagne électorale et de vote pour une consultation dont la date serait convenue pour septembre ou octobre 2022 selon la situation sanitaire, qui aurait toutefois, à ce moment-là, perduré dans le mode de vie local.
L’Accord de Nouméa prévoit en cas de troisième Non que les forces politiques discutent de la situation ainsi créée. Nous ne respecterons le résultat de la dernière consultation qu’à la condition qu’elle se déroule dans un climat social serein et apaisé et après une campagne équitable.
Si l’État français décide malgré tout du maintien de la date du 12 décembre, les groupes politiques lui ont déjà signifié leur décision irrévocable de non-participation, en ne transmettant pas de document de propagande à la commission de contrôle pour la consultation référendaire.
Le refus de tout engagement sur la période de transition
Si l’État français décide malgré tout du maintien de la date du 12 décembre, qui sera alors autour de la table pour discuter le lendemain ? Nous n’y serons pas. Nous ne nous sentons pas engagés dans le calendrier d’une période, transitoire ou non, qui nous amènerait en juin 2023.
La conséquence du maintien de la date du 12 décembre rendra impossible toute sérénité pour notre avenir institutionnel et économique à court ou moyen terme. L’État français devra assumer seul sa responsabilité dans la situation ainsi créée. La population n’acceptera pas le résultat d’une troisième consultation organisée dans les conditions actuelles. Le moment venu, si nécessaire, nous pointerons devant la communauté internationale les manquements, les dessous et les travers d’un État passéiste qui ne tient pas parole et se cramponne à des schémas réducteurs d’antan. Le temps de la colonisation est révolu.
Notre futur se conjuguera dans une pleine et entière souveraineté, parce qu’aujourd’hui ce qui nous divise c’est la néocolonisation française. Il faut clore définitivement cette situation. Nous avons toujours rappelé notre souhait de la définition d’un nouveau lien avec la France ou d’autres pays, comme le préconise l’Accord de Nouméa. Ce choix est celui d’un État souverain et libre de co-construire une interdépendance comme l’affirmait Jean-Marie Tjibaou. L’approfondissement de ces interdépendances ou de ces partenariats doit être le cœur de la réflexion autour d’un référendum de projet pour la 3e consultation. Mais s’il faut absolument choisir entre la liberté et ces interdépendances, alors nous choisirons notre liberté.